Annonce Le Baloutchistan secoué par des émeutes après la mort du chef nationaliste Nawab Akbar Bugti La tension restait très vive lundi 28 août à Quetta, capitale de la province du Baloutchistan, après vingt-quatre heures d'émeutes consécutives à la mort du chef tribal Nawab Akbar Bugti, tué samedi 26 août dans un bombardement de l'armée pakistanaise. Quelque 450 personnes ont été interpellées, dimanche, à Quetta, où des dizaines de boutiques, autocars, véhicules de police, bâtiments administratifs ont été incendiés. La violence s'est étendue à quasiment tous les districts du Baloutchistan et même à la province du Sind et à sa capitale, Karachi, où vit une forte communauté baloutche. L'alliance de quatre partis nationalistes baloutches a annoncé quinze jours de deuil et s'est montrée déterminée à poursuivre les mouvements de protestation. "Les nationalistes baloutches ne pardonneront pas à Islamabad la perte immense infligée à la nation baloutche", a affirmé Kachkol Ali Balotch, chef de l'opposition à l'assemblée provinciale. Symbole vénéré de la lutte des Baloutches pour la reconnaissance et le respect de leur identité et de leur province, Nawab Akbar Bugti, 79 ans, était entré en clandestinité fin 2005 à la suite d'un attentat manqué, au Baloutchistan, contre le président pakistanais, Pervez Musharraf, qui avait relancé la campagne militaire contre les Baloutches. Nawab Akbar Bugti vivait, depuis, dans une cave du district de Kohlu, à 220 km à l'est de Quetta, d'où il restait en contact avec ses partisans par téléphone satellite. C'est par ce moyen que l'armée l'aurait localisé avant de monter une opération contre lui. Bugti serait mort dans l'effondrement de sa cache, avec un nombre encore indéterminé de ses fidèles. Au minimum cinq militaires ont été tués. La classe politique dans son ensemble, y compris le chef de la Ligue musulmane (PML-Q) qui soutient le régime militaire, a critiqué l'action de l'armée, craignant que celle-ci n'aggrave l'instabilité au Baloutchistan et ailleurs. "C'est un incident très triste qui n'aurait pas dû arriver", a affirmé Shujaat Hussein, chef de la PML-Q. Province frontalière de l'Iran et de l'Afghanistan, le Baloutchistan est par sa superficie (47 % du total) la plus grande province du Pakistan, mais la moins peuplée avec seulement 6,5 millions d'habitants, soit 5,14 % des 150 millions de Pakistanais. Alors que le sous-sol du Baloutchistan est riche notamment en gaz et en minéraux, les Baloutches sont socialement les plus défavorisés du pays. C'est pour obtenir une "juste part" des richesses extraites de leur sol et une participation de la population locale au développement de leur province, notamment à Gwadar, où se construit un vaste port en eau profonde, que Bugti et ses pairs menaient une lutte de plus en plus violente contre les autorités. Malgré quelques tentatives politiques, le pouvoir n'a jamais réellement cherché à résoudre un problème qui remonte à la création du Pakistan. Des dizaines de jeunes Baloutches arrêtés dans les opérations militaires menées depuis 2005 ont "disparu". Dans un rapport rendu public au début de l'année à la suite d'une mission d'investigation, la Commission pakistanaise des droits de l'homme parlait d'"exemples largement répandus de disparitions, de tortures sur des détenus" et d'informations "alarmantes sur des exécutions sommaires".