Signature Le 26 avril 1915, l'Italie signe un traité secret avec l'Angleterre et la France, qui sont en guerre contre l'Allemagne et l'Autriche-Hongrie. L'Italie était liée depuis 1892 à ces deux pays par un accord appelé Triple-Alliance ou Triplice. Mais lorsqu'a éclaté la Grande Guerre, le nouveau président du Conseil, le libéral Antonio Salandra, n'a pas souhaité se joindre à eux en raison du désir de paix de la grande majorité des Italiens. Du marchandage à la guerre Tandis que le conflit s'éternise dans le reste de l'Europe, l'effervescence monte dans la bourgeoisie italienne et notamment chez les intellectuels. Un certain Benito Mussolini, chef des socialistes révolutionnaires et rédacteur en chef du journal L'Unita, se convertit à l'interventionnisme, ce qui lui vaut d'être expulsé de son parti. Il fonde Il Popolo d'Italia où il fait campagne en faveur d'une entrée en guerre aux côtés des Alliés. Comme le poète nationaliste Gabriele d'Annunzio, il exalte les antiques vertus guerrières des Italiens. Il plaide pour la conquête des terres «irredente», peuplées par des Italiens mais sous souveraineté austro-hongroise. Il voit aussi dans la guerre un moyen pour le peuple d'oublier son mal-être quotidien. Comme la plupart des Italiens, le vieux leader Giovanni Giolitti (63 ans) préfèrerait que le pays se contente de marchander sa neutralité au nom de l'«égoïsme sacré». C'est ce que tente le président du Conseil en ouvrant des discussions avec les Alliés. Mais le marchandage débouche à Londres sur la promesse en bonne et due forme d'une entrée en guerre en échange de l'obtention après la guerre d'une bonne partie de la côte adriatique ainsi que de territoires turcs et de colonies. Ce traité secret enfreint l'esprit démocratique au nom duquel se battent les Français et les Anglais. À Rome, le 3 mai, Antonio Salandra dénonce la Triplice en vue de préparer l'entrée en guerre de l'Italie. Le Parlement, qui n'a pas été consulté, s'insurge et renverse le gouvernement. Les interventionnistes, Mussolini et d'Annunzio en tête, manifestent dans tout le pays. Le roi Victor-Emmanuel III, qui est lui-même favorable à l'intervention, rappelle Salandra à la tête du gouvernement. Celui-ci déclare officiellement la guerre à l'Autriche-Hongrie le 23 mai 1915 et à l'Allemagne le... 28 août 1916. Notons que d'Annunzio (52 ans) s'engage aussitôt comme capitaine et s'illustre par quelques coups d'éclat. Mussolini (32 ans) s'engage comme bersagliere et ne se montre pas moins courageux. Nommé caporal, il est gravement blessé en février 1917 et, réformé, reprend la direction de son journal. Aléas de la guerre L'entrée en guerre de l'Italie soulage les Russes, qui peinaient en Pologne face aux Autrichiens et aux Allemands. Mais pas davantage que les autres combattants, les Italiens n'arrivent à emporter la décision. Le chef d'état-major Luigi Cadorna subit de graves revers au printemps 1917 sur l'Isonzo et le Carso, des cours d'eau alpins, et en octobre 1917, il est mis en échec par les Autrichiens qui percent le front à Caporetto, obligeant les Italiens à reculer sur la Piave et à céder la plus grande partie de la Vénétie. Cette défaite vaut à Cadorna d'être limogé (il sera plus tard réhabilité par Mussolini et le Duce lui confèrera le titre de maréchal). Son successeur, Armando Diaz, redresse la situation et les 24-28 octobre 1918, remporte la victoire de Vittorio Veneto. Le 3 novembre, une semaine avant l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie demande l'armistice. Après la guerre, insatisfaite par les traités de paix, qui ne lui accordent qu'une modeste partie des territoires qu'elle revendiquait, l'Italie négocie avec la Yougoslavie, à Rapallo, une rectification des nouvelles frontières... Il y en aura beaucoup d'autres. Épisode suivant