Annonce Laurent Gbagbo ouvre la voie à une candidature d'Alassane Ouattara à la présidence L'article 35 de la Constitution, que le président ivoirien accepte de réviser, exige que tout candidat soit "de père et de mère ivoirien d'origine". Il empêche actuellement l'opposant Alassane Ouattara, chef du Rassemblement des Républicains (RDR) de se présenter à la présidentielle de 2005. La visite du président sud-africain Thabo Mbeki en Côte d'Ivoire laisse espérer une avancée dans l'application des accords de paix avec l'acceptation samedi 4 décembre par le président Laurent Gbagbo d'engager la procédure de révision des conditions d'éligibilité à la présidence de la République. Arrivé jeudi à Abidjan porteur d'une "feuille de route pour la paix", M. Mbeki a obtenu, après deux jours de consultations avec le chef de l'Etat ivoirien et des représentants de l'opposition, que la révision de l'article 35 soit examinée "immédiatement" par les députés. Ce point, et plus généralement le concept "d'ivoirité" et de définition de la nationalité ivoirienne, sont au coeur de la crise politique qui déchire le pays depuis le coup d'Etat raté de septembre 2002 qui a abouti à la partition de la Côte d'Ivoire, avec une rébellion qui contrôle le nord du pays. Le président Gbagbo s'opposait jusqu'à présent à l'examen parlementaire de l'article 35, arguant du respect de la Constitution du pays, qui prévoit qu'aucune procédure de révision constitutionnelle ne peut être engagée s'"il est porté atteinte à l'intégrité du territoire". Les accords de paix de Linas-Marcoussis, signés en France en janvier 2003 et restés inappliqués à ce jour, prévoyaient notamment la modification de cet article, au titre duquel l'opposant Alassane Ouattara, président du Rassemblement des Républicains (RDR) a été exclu du scrutin présidentiel de 2000. Selon cet accord, l'article 35 dans sa nouvelle forme stipulerait qu'il suffit d'être "né de père OU de mère ivoirien d'origine" pour être candidat, et non plus "de père ET de mère ivoirien d'origine", comme le prévoit l'actuelle Constitution, adoptée par référendum en juillet 2000. Le 15 octobre, les rebelles avaient refusé d'entamer un processus de désarmement, estimant que les plus importantes réformes politiques de Marcoussis n'avaient pas été votées, en particulier la révision de l'article 35. PRESSION INTERNATIONALE Ce changement d'attitude du président Gbagbo pourrait être lié à la menace de sanctions de l'ONU à compter du 15 décembre prochain, selon une source diplomatique occidentale. Avec un embargo sur les armes, la résolution 1572 menace de geler les avoirs des personnalités ivoiriennes et d'interdire leur déplacement à l'étranger, en cas d'entrave à la mise en oeuvre des accords de Marcoussis. La rébellion des Forces Nouvelles (FN) n'a pas encore réagi officiellement à cette annonce, mais elle a déjà fait savoir à plusieurs reprises qu'elle considérait les accords de Marcoussis comme "caducs" après l'offensive gouvernementale avortée du 4 novembre dernier sur les positions rebelles. Les rebelles, qui n'ont pas de représentants à l'Assemblée, estiment que certaines dispositions de Marcoussis déjà examinées par les parlementaires ivoiriens ont été vidées de leur substance à la suite d'amendements du FPI (Front populaire ivoirien, parti présidentiel). S'exprimant samedi en fin d'après-midi devant l'Assemblée nationale ivoirienne, M. Mbeki a demandé aux députés d'adopter "au plus vite" les réformes politiques prévues par Marcoussis, dont l'article 35, pour permettre la tenue d'élections générales à l'échéance prévue d'octobre 2005. En réponse à ce discours, le président de l'Assemblée, Mamadou Koulibaly (considéré comme un dur du régime), a évoqué la possibilité d'un examen de l'article 35 en janvier 2005, lors d'une session extraordinaire, dont la date reste à fixer. Le président sud-africain se rendra dimanche à Bouaké (centre), fief des rebelles des FN avec lesquels il s'était déjà entretenu lors de consultations préalables fin novembre en Afrique du Sud. L'accord du président Gbagbo à la révision de l'article 35 intervient près d'un mois après une offensive militaire ratée des forces loyalistes contre la rébellion et de violentes manifestations anti-françaises à Abidjan.