Annonce La négation du génocide arménien débattue à l'Assemblée Les députés français débattent, jeudi matin 18 mai, de la proposition de loi socialiste visant à sanctionner la négation du génocide arménien, dont Paris reconnaît l'existence depuis janvier 2001. S'inspirant de la loi Gayssot de 1992 sur la Shoah, elle prévoit des peines de cinq ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende pour les personnes qui nient le génocide arménien. Après la polémique autour de l'amendement sur le "rôle positif" de la colonisation, la question divise les députés et place l'exécutif dans l'embarras. La proposition de loi risque, en effet, de provoquer la fureur de la Turquie. Le groupe UMP, qui détient la majorité absolue, est contre ce texte même s'il a décidé de laisser la liberté de vote à ses membres. Il y a de fortes probabilités pour qu'en séance publique les députés décident de ne pas passer à l'examen de l'article unique de la proposition de loi, entraînant le rejet du texte. A la veille de ce débat, l'entourage de Jacques Chirac a rappelé l'"attachement" du président à ce que "le travail de mémoire soit accompli notamment en ce qui concerne le génocide arménien". Pour le chef de l'Etat, la loi de janvier 2001 "s'impose à tous". "A plusieurs reprises le président de la République a eu l'occasion de souligner l'importance que revêt le travail de mémoire pour la Turquie dans le cadre de la prise en compte des valeurs européennes dans laquelle ce pays s'est engagé", a-t-on ajouté de même source. "Cette question touche aussi au rôle du Parlement en ce qui concerne l'Histoire. C'est une question sensible qui exige une réflexion sereine dans un esprit de responsabilité." QUESTION ULTRASENSIBLE EN TURQUIE Le sujet a été évoqué entre Jacques Chirac et le premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, la semaine dernière, en marge du sommet Union européenne-Amérique latine de Vienne. De 1915 à 1917, les massacres et déportations d'Arméniens ont fait 1,5 million de morts, selon les Arméniens, entre 300 000 et 500 000 selon Ankara. Les autorités turques rejettent la qualification de génocide et considèrent qu'il s'agit du bilan de combats partisans qui ont été encore plus meurtriers pour les Turcs musulmans. La question arménienne, ultrasensible en Turquie, figure aussi parmi les obstacles à l'adhésion d'Ankara à l'Union européenne, dont les négociations ont été lancées en octobre 2005. Une résolution non contraignante votée par le Parlement européen demande à la Turquie de reconnaître la réalité du génocide arménien avant de prétendre entrer dans le bloc communautaire. A l'appel du Conseil de coordination des organisations arméniennes de France (CCAF), une manifestation devait être organisée devant l'Assemblée nationale à Paris, jeudi à 9 h 30. Le Comité de défense de la cause arménienne (CDCA) invite, dans un communiqué, la communauté arménienne à participer à ce moment "afin de défendre le respect de la mémoire ainsi que les valeurs de justice et de démocratie". "Ce rassemblement de soutien aux députés favorables à une loi punitive se veut républicain", ajoute-t-il. La France abrite la plus importante communauté arménienne en Europe avec 400 000 personnes environ. Pour les médias turcs, le dépôt de la proposition de loi s'explique par la volonté de gagner ces "voix arméniennes" lors de la présidentielle 2007. Avec Reuters