Lancement La navette Discovery dans l'espace et sans encombreLa NASA a lancé avec succès la navette Discovery après avoir jugé sans conséquence une fissure découverte la veille sur la mousse isolante du réservoir externe de la navette. Les responsables du vol et de la mission avaient dû renoncer à lancer Discovery les 1er et 2 juillet en raison de formations orageuses et de risques de foudre dans les environs du centre spatial Kennedy près de Cap Canaveral, en Floride.Lundi, la NASA avait décidé de faire une pause pour que l'équipage et les équipes de préparation au lancement puissent se reposer et recharger les piles à combustible de la navette, qui fournissent son électricité. Depuis la catastrophe de Columbia le 1er février 2003, la NASA n'a lancé que deux vols de navettes américaines, le dernier remontant à un an. Discovery emmène sept astronautes à son bord, deux femmes et cinq hommes, dont le spationaute allemand Thomas Reiter de l'Agence spatiale européenne (ESA). Ils doivent effectuer une mission de douze jours sur orbite, dont huit arrimés à la Station spatiale internationale (ISS).STATION À MOITIÉ TERMINÉELeur intervention est jugée cruciale pour achever les travaux de la Station, qui n'est qu'à moitié terminée, et pour poursuivre le programme d'exploration de l'espace. L'avenir des vols habités est entaché de trop d'échecs et de trop de morts pour ne pas s'interroger sur le pérennité du programme spatial américain de conquête de l'espace. En effet, depuis les victoires d'Apollo ont succédé les échecs de la navette, trop complexe, trop coûteuse, trop dangereuse pour tenir ses promesses d'avion et de camion de l'espace. Après la catastrophe de Challenger, qui sonnait en 1986 le glas anticipé du programme, celle de Columbia, en 2003, a fortement compromis l'achèvement de l'ISS, unique destination des véhicules américains. Ces défaites de l'homme dans l'espace, dues à des mauvais choix au sortir de l'ère Apollo, apparaissent d'autant plus patentes que d'autres ont réussi, à la même époque, à s'imposer comme d'infatigables arpenteurs du cosmos. Ils n'ont ni chair ni sang, mais des bras téléguidés et des yeux mécaniques. De Viking, en 1976, à Spirit et Opportunity, sur Mars depuis 2004, des Voyager qui s'avancent vers les frontières du système solaire à Cassini-Huygens qui détaille les secrets de Saturne et la surface de Titan, sondes interplanétaires et robots d'exploration ont opposé trente années de triomphes aux déceptions des vols de moins en moins habités par la passion. Ils sont devenus les premiers acteurs du rêve spatial. "Il était d'autant plus choquant d'entendre George Bush justifier le retour des Américains sur la Lune dans son grand discours de 2004, qu'il ne s'appuyait que sur des exemples de réussites fournis par les vols automatiques", s'indigne Serge Brunier, récent auteur d'un pamphlet contre les astronautes (Impasse de l'espace, Seuil, 292 p., 22 euros).DÉCOLLAGE SANS ENCOMBREPour les scientifiques, cette injustice se traduit très prosaïquement en pertes de financements. Tout occupée par la fin de carrière de la navette, prévue en 2010, et par la préparation de l'expédition lunaire, annoncée pour au mieux 2018-2020, la NASA n'a eu d'autre choix que de restreindre drastiquement certains budgets, en annulant ou retardant plusieurs missions robotisées. Ces derniers temps, les scientifiques américains se sont donc mobilisés pour tenter de sauver l'essentiel. Dans un jeu de pressions classiques sur le Congrès, qui peut encore modifier l'enveloppe de l'agence spatiale, les pétitions se sont multipliées, les attaques contre les aventures humaines se sont faites plus virulentes, de la part de chercheurs qui ne les ont jamais appréciées.Michael Griffin, l'administrateur de la NASA, a toutefois décidé de poursuivre le programme. Mardi 4 juillet, jour de la fête nationale américaine, Discovery a décollé sans encombre, il reste encore quatorze décollages à accomplir pour terminer la construction de la station spatiale internationale. De nombreuses interrogations demeurent.
