Anniversaire La loi sur la "laïcité à la française" fête ses 100 ans Arandie comme un symbole de la République, la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat qui fonde la "laïcité à la française" fête ses 100 ans vendredi 9 décembre, dans un contexte sensible où le modèle d'intégration des musulmans est remis en question. La loi du 9 décembre 1905, principalement conçue pour contrer l'influence politique des catholiques au début du XXe siècle, a sonné le glas des subventions publiques aux religions, ne laissant à l'Etat que l'entretien des lieux de culte existants. "La République assure la liberté de conscience" et "garantit le libre exercice des cultes" mais "ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte", dit le texte, aussitôt condamné par le pape Pie X. Après des siècles de monarchie de droit divin et des décennies de querelles autour du clergé, cette loi s'inscrit dans la logique de laïcisation entreprise avec les lois des années 1880 sur l'école publique ou celle de 1901 sur les associations. Elle a déchaîné les passions pendant vingt ans, puis le débat s'est peu à peu apaisé. UNE ADAPTATION ENVISAGÉE Aujourd'hui, la classe politique est unanime pour proclamer son attachement à cette loi qu'aucune religion ne conteste sur le fond et qui apparaît comme l'acte fondateur du modèle républicain dont la France se targue, malgré les échecs mis en lumière par la récente crise des banlieues à forte population originaire du Maghreb ou d'Afrique noire. Parmi les fervents défenseurs de la loi de 1905 figure le président Jacques Chirac. Il la considère comme "un pilier" permettant à la France de vivre dans un "climat de liberté, de concorde et de tolérance religieuse". Mais le ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy, chargé des cultes, a relancé la polémique en créant, en octobre, une commission de réflexion sur son application et son éventuel aménagement. Les propositions sont attendues pour juin, incluant au besoin "des ajustements législatifs et réglementaires". Nicolas Sarkozy souhaite une adaptation de la loi de 1905 pour répondre au manque de lieux de culte de l'islam, devenu, avec environ cinq millions de fidèles, la deuxième religion de France derrière le catholicisme (40 millions). Loin devant le protestantisme (un million) et le judaïsme (600 000). Absents du pays avant 1905, l'islam comme le bouddhisme ne bénéficient pas de "l'entretien" par l'Etat de leur patrimoine cultuel. Ce patrimoine est d'ailleurs quasi inexistant en ce qui concerne les musulmans, qui peinent à financer leurs mosquées sans fonds étrangers. Si la création d'une commission de réflexion a réjoui les protestants, favorables à un toilettage de la loi de 1905 – déjà révisée dix fois –, les catholiques et les juifs préféreraient qu'on ne "touche" pas aux "équilibres" instaurés. Les musulmans attendent les conclusions avec prudence mais se sont déjà "réjouis" que l'on se penche sur leur "problème". SIGNES OSTENSIBLES Les thèmes de l'islam et de la laïcité ont déjà été confrontés en 2004 lorsqu'une loi a interdit les signes religieux ostensibles à l'école, suscitant l'inquiétude dans le monde arabe et jusqu'à l'ONU. Nombreux sont ceux qui déplorent un texte dirigé contre le port du voile musulman même si, à côté de jeunes filles voilées, quelques jeunes sikhs ont aussi été exclus d'écoles pour n'avoir pas retiré leur turban. La laïcité d'Etat affichée depuis 1905 crée souvent des situations bancales dans cette France longtemps "fille aînée de l'Eglise". La mise en berne des drapeaux sur les édifices publics décrétée pour la mort du pape Jean-Paul II avait suscité des protestations, notamment d'enseignants, dans un pays où des mentions républicaines trônent parfois au fronton des églises et où l'enseignement religieux n'a lieu qu'en dehors du système public.