Découverte La glaciation de l'hémisphère Nord serait plus ancienne qu'on ne le supposait Dans une étude publiée dans la revue Nature de jeudi 21 juillet, des scientifiques estiment que la première ère glaciaire au niveau planétaire s'est ouverte sur Terre voilà quelque 34 millions d'années, soit beaucoup plus tôt qu'on ne le pensait. Les deux calottes glaciaires se seraient ainsi formées de manière quasi simultanée.  Selon les hypothèses généralement admises, les calottes glaciaires comparables à celles qui couvrent aujourd'hui le Groenland et le pôle Sud n'ont fait leur apparition, dans le Nord, qu'il y a une dizaine de millions d'années. Aradhna Tripati, de l'université de Cambridge, et ses collègues britanniques et suédois ne sont plus d'accord. Grâce à l'analyse isotopique d'échantillons de calcite prélevés par carottage dans les sédiments marins du Pacifique tropical et du sud de l'océan Atlantique, les scientifiques ont découvert qu'après une période où la Terre était une immense"serre chaude", il y a 55 millions d'années, la situation a commencé à changer d'une manière importante il y a 42 millions d'années. Puis, il y a 34 millions d'années (période géologique connue sous le nom de"limite éocène-oligocène"), quand la calotte antarctique a débuté sa croissance, celle du Nord a également commencé à se former, ont-ils "lu" dans les archives naturelles des fonds océaniques. L'ANALYSE D'ORGANISMES UNICELLULAIRES Ces conclusions contredisent les hypothèses actuelles selon lesquelles cet événement ne se serait produit qu'au cours des 6 à 10 derniers millions d'années. Ce sont les squelettes calcaires d'organismes unicellulaires appelés foraminifères qui leur ont permis de connaître la nature des dépôts sédimentaires dans lesquels ils ont vécu. Les foraminifères fabriquent en effet le calcaire de leur squelette à partir des éléments contenus dans l'eau de mer, en premier lieu l'oxygène de l'eau. Ainsi, leur teneur en isotopes de l'oxygène indique s'ils ont été confrontés à un milieu chaud ou froid. Selon Aradhna Tripati et ses collègues, les indices obtenus correspondent à un abaissement du niveau de la mer global de 100 à 125 mètres au moins. Cette chute de niveau aurait été provoqué par un stockage significatif de glace dans les deux hémisphères car, insistent-ils, la calotte antarctique ne suffit pas à expliquer l'ampleur du phénomène. Les dépôts de carbonate de calcium ont changé en même temps, suggérant un rôle important pour le cycle du carbone. On pensait jusqu'à présent que les grandes glaces avaient fait leur apparition d'abord en Antarctique, après une diminution des concentrations atmosphériques de dioxyde de carbone (C02, gaz à effet de serre associé aux risques de réchauffement climatique, dû cette fois surtout aux activités humaines). "Si la baisse du taux de CO2 atmosphérique a stabilisé l'état glaciaire dans l'oligocène, s'interroge Lee Kump, de l'université de Pennsylvanie, dans un commentaire publié par Nature, son accroissement par l'utilisation de combustible fossile la déstabilisera-t-il à l'avenir ?" . Selon lui, la leçon à tirer de cette étude est que nous devrions observer attentivement "tous les signes subtils de passage du monde glaciaire dans lequel la Terre est restée pendant 34 millions d'années vers un nouveau monde de serre chaude".