Diffusion La diffusion d'un film portant "atteinte à la présomption d'innocence" de Francis Heaulme est autorisée Le tribunal de grande instance de Nanterre (Hauts-de-Seine) n'a pas ordonné, mercredi 9 mars, la suspension de la diffusion, jeudi 10 mars à 20 h 50, sur TF1 du téléfilm "Dans la tête du tueur" qui relate le parcours criminel du tueur en série Francis Heaulme ("Le Monde Radio-Télévision" daté 6-7 mars). En revanche, statuant dans le cadre d'un référé, le tribunal a estimé que la fiction porte "atteinte à la présomption d'innocence" de Francis Heaulme. Le tribunal lui a accordé 3 000 euros au titre des frais de procédure, condamnant la chaîne aux dépens.La présidente du tribunal, Francine Levon-Guérin, a enjoint TF1 de diffuser un "communiqué judiciaire (...) pendant vingt secondes, avant le lancement du film", reprenant le texte suivant : "Il est prêté à un enquêteur (le gendarme Abgrall, interprété par Bernard Giraudeau) des propos et des impressions qui présentent Francis Heaulme comme étant coupable du meurtre des deux enfants commis le 28 septembre 1986 à Montigny-lès-Metz (Moselle). L'intéressé n'a pas été mis en examen dans l'information judiciaire ouverte contre personne non dénommée, en septembre 2004 à Metz, à la suite de la révision du procès de Patrick Dils qui, initialement condamné pour ces faits, a été acquitté. Ces déclarations portent atteinte à la présomption d'innocence dont Francis Heaulme bénéficie comme toute autre personne."Dans son assignation, Me Liliane Glock, avocate de Francis Heaulme, qui avait été autorisée à passer le film à son client, à la prison de Metz-Queuleu, avait pointé un extrait des dialogues où Bernard Giraudeau disait : " L'idée que Patrick Dils paie pour ses crimes -ceux d'Heaulme- reste pour moi le pire des cauchemars."DOULEUR RAVIVÉEMe Glock n'excluait pas la possibilité de faire appel de la décision car, selon elle, "un principe essentiel est bafoué, la justice le reconnaît mais ne fait rien pour l'empêcher". L'avocate a développé les mêmes arguments dans un courrier adressé, mercredi, au doyen des juges d'instruction de Metz, Thierry Monfort, chargé de l'information sur le double meurtre de Montigny-lès-Metz. Me Glock lui demande d'interdire la diffusion du film "dans l'intérêt de l'enquête". "Si ce programme est diffusé, il formatera le cerveau d'au moins dix millions de téléspectateurs à la thèse de TF1. La justice n'aura plus rien à dire et vous n'aurez plus rien à instruire", a écrit l'avocate.Des victimes du tueur se sont manifestées. Ginette Beckrich, la grand-mère d'un des deux enfants assassinés à Montigny-lès-Metz, s'est indignée que l'on puisse "faire du fric et du cinéma sur le dos de -son- petit-fils". Dans un entretien au quotidien belge Le Soir, les parents du petit Joris Viville, tué par Francis Heaulme en 1989 près de Saint-Tropez (Var), se sont dits "outrés de l'attitude de TF1", qui s'est "abstenue de les consulter" sur une émission qui "ne peut que raviver -leur- douleur".Autorisée à diffuser "Dans la tête du tueur", TF1 a cependant préféré "surseoir à la diffusion" du docu-fiction "La tragédie de Nanterre" prévue le 15 mars. Ce téléfilm reconstitue, en mêlant témoignages, archives et fiction, la tuerie du conseil municipal de Nanterre, qui avait fait 8 morts et 19 blessés le 27 mars 2002. Des victimes, qui avaient d'abord donné leur accord pour diffuser le docu-fiction, auraient changé d'avis.Nicolas Bastuck avec Guy Dutheil (à Paris)
