Annonce La cour d'appel donne raison à Tapie dans l'affaire Adidas La somme allouée hier par la justice permet à Bernard Tapie de sortir de la faillite personnelle. (Photo Eric Feferberg/AFP.)Eric Decouty[01 octobre 2005] Cette décision permet à Bernard Tapie d'envisager la fin de ses ennuis et de sortir l'ancien ministre de la faillite personnelle. En effaçant son ardoise judiciaire et fiscale, la justice lui ouvre également de nouveaux horizons. «Plus rien ne lui est désormais interdit, soulignait hier un de ses proches, que ce soit dans les affaires, le football et, pourquoi pas, la politique.» En attendant, l'arrêt rendu hier par la cour d'appel met un terme à un marathon de procédures judiciaires. En 1996, les actionnaires minoritaires de Bernard Tapie Finances (BTF) – c'est-à-dire essentiellement Bernard Tapie – avaient engagé des poursuites estimant avoir été floués lors de la vente de la société Adidas à Robert Louis-Dreyfus. Tapie estimait en substance que le Crédit lyonnais, à qui il avait confié un mandat de vente d'Adidas, lui avait délibérément dissimulé la plus-value. En juin dernier, lors de l'audience devant la cour d'appel, Bernard Tapie, représenté par les liquidateurs de son groupe, réclamait 990 millions d'euros pour le préjudice qu'il estimait avoir subi. Me Jean-Pierre Martel, l'avocat du CDR, avait alors fustigé «les chiffres folkloriques et caricaturalement faux» avancés par Bernard Tapie. «Le banquier n'a pas volé son client», avait-il également plaidé, estimant bien au contraire que le Crédit lyonnais «avait permis à son client de faire 203 millions de francs de plus-value (NDLR : entre l'achat d'Adidas en 1990 par Bernard Tapie et la revente en 1992), en lui évitant la faillite et celle d'Adidas.» «Il faut démystifier cette légende entretenue par Bernard Tapie depuis dix ans selon laquelle le banquier a revendu au double du prix convenu», concluait l'avocat. Les magistrats de la cour d'appel ont apporté un démenti cinglant au défenseur du CDR. Sur le fond, ils ont bel et bien reconnu que la banque avait floué Bernard Tapie et ses actionnaires en vendant Adidas à un prix supérieur à celui annoncé et en effectuant une plus-value qu'elle avait dissimulée à leur client. Les termes de l'arrêt rendu hier sont cinglants : «Avec une constance inexplicable, les dirigeants de la structure de défaisance, le CDR, qui n'ont aucune responsabilité dans les agissements répréhensibles antérieurs du Crédit Lyonnais (..) s'obstinent à défendre des pratiques critiquables. (..) Ils accréditent ainsi la réalité de l'acquisition par personne interposée, et portent atteinte à l'image, à la réputation et à la crédibilité d'un établissement financier dont il a pu être dit qu'il peine à reconnaître ses erreurs et en assumer les conséquences». Les magistrats écrivent encore que les négociations entre le Crédit Lyonnais et Robert Louis-Dreyfus fin 1992 puis début 1993 portaient dès le début sur une «valorisation d'Adidas à 4,485 milliards de francs, valeur retenue par le Crédit Lyonnais. (..) L'obligation d'informer son mandataire, le devoir de loyauté, de transparence et le souci de déontologie de toute banque (..) exigeait de faire connaître à monsieur Tapie qu'un repreneur était éventuellement acheteur à 4,485 milliards de francs à comparer au prix de 2,8 milliards du mandat». Bref, le Crédit Lyonnais a dissimulé cette plus value. «Le groupe Crédit Lyonnais en se portant contrepartie par personnes interposées et en n'informant pas loyalement son client (NDLR : Bernard Tapie) n'a pas respecté les obligations de son mandat.» Au terme de cet arrêt, la cour a naturellement assorti la condamnation de dommages et intérêts dont le Crédit lyonnais et le CDR – c'est-à-dire l'Etat – devront s'acquitter pour un montant de 135 millions d'euros, soit près d'un milliard de francs. Si les magistrats n'ont pas suivi la demande de Bernard Tapie et de ses conseils, la somme allouée par la justice n'en reste pas moins considérable et permet à l'homme d'affaires de mettre un terme à ses ennuis.Quant au Crédit Lyonnais et au CDR, outre les 135 millions d'euros qu'ils vont devoir régler, ils sont également condamnés à payer 300 000 euros de frais de procédure aux liquidateurs.«Les compteurs sont remis à zéro», soulignait hier, radieux, un proche de l'homme d'affaires qui est demeuré muet en n'apparaissant pas à la conférence de presse organisée par ses avocats.
