Procès La commission de révision examine le dossier Seznec, plus de 80 ans après PARIS (AFP) - La commission de révision examine lundi le dossier Guillaume Seznec qui reste, plus de 80 ans après sa condamnation aux travaux forcés à perpétuité, l'une des plus grandes énigmes criminelles du XXè siècle. Guillaume Seznec a-t-il ou non tué son ami Pierre Quéméneur, conseiller général, lors d'un voyage commun à Paris fin mai 1923 pour négocier la vente de voitures américaines ? A cette question, la cour d'assises du Finistère a répondu "oui" en novembre 1924 et a condamné cet habitant de Morlaix à finir ses jours au bagne. Seznec, grâcié en 1947 pour bonne conduite après 20 ans passés à Cayenne, a toujours clamé son innocence. Sa fille, puis son petit-fils, Denis, ont continué son combat. La commission de révision n'est pas directement saisie de cette question mais doit examiner si des faits apparus depuis ce procès sont ou non de nature à faire douter de la culpabilité de Seznec. Si c'est le cas, la commission transmettra à la chambre criminelle de la Cour de cassation, siégeant comme Cour de révision, seule habilitée à prononcer une révision, en l'occurence l'annulation de la sanction. Le dossier, déposé en mars 2001, a été préparé par la Chancellerie -- un cas unique dans les annales judiciaires-- du temps où Marilyse Lebranchu, ancienne élue de Morlaix, était garde des Sceaux. Il s'articule autour d'un dénommé Gherdi et de ses relations au moment des faits avec l'inspecteur de police Pierre Bonny, cheville ouvrière de l'enquête criminelle. Revenu seul de Paris, Seznec avait été soupçonné d'avoir tué Quéméneur, qui n'a jamais donné signe vie, hormis un télégramme envoyé du Havre et qu'une expertise imputera à Seznec. Dès le début de l'enquête, Seznec avait cité ce Gherdi comme étant un homme avec qui Quéméneur avait rendez-vous à Paris. A l'époque, cet homme qui n'avait pu être retrouvé avait été considéré comme une invention de Seznec. Identifié quelques années plus tard, ce Gherdi avait été jugé, lors d'une première procédure de révision en 1996, comme un élément nouveau mais pas susceptible de faire naître un doute. Cette seconde requête en révision reprend les mêmes éléments que ceux produits lors de la première demande, mais aussi d'autres faits "beaucoup plus nombreux et beaucoup plus précis", indiquait récemment à l'AFP un de ses avocats, Me Jean-Denis Bredin. De nouveaux témoignages permettent en effet de dresser un portrait trouble de ce Gherdi, "trafiquant de voitures américaines vers l'URSS après la première guerre mondiale", et surtout agent de la Gestapo en lien avec l'inspecteur Bonny, le policier qui a dirigé l'enquête Seznec et fut fusillé en 1944 après avoir servi dans la Gestapo. Ces révélations ont été faites par une résistante, Colette Noll, arrêtée en 1944 et déportée à Ravensbrück, qui s'est souvenue de Gherdi et de ses rapports notamment avec Bonny. De quoi étayer la thèse du coup monté soutenu depuis le début par Seznec --décédé en 1954 quelques mois après avoir été renversé par une camionnette qui n'a jamais été retrouvée-- puis ceux qui se battent pour sa réhabilitation. D'autant que "tout le dossier contre Seznec n'a été constitué que par l'inspecteur Pierre Bonny", soulignait encore Me Bredin. De son côté, Denis Seznec, persuadé que son grand-père "est déjà réhabilité dans l'opinion", espère qu'au "plus haut niveau de la justice, on saura reconnaître qu'elle peut parfois se tromper".