Annonce La Chambre des représentants des Etats-Unis évoque un "génocide" au Soudan La Chambre des représentants a adopté jeudi une résolution qualifiant de "génocide" la situation dans le Darfour soudanais, les défenseurs du texte espérant que cette mesure convaincra l'ONU de se mobiliser en faveur de la protection des communautés noires sujettes aux exactions de miliciens arabes. La Chambre des représentants a adopté le texte à l'unanimité, alors qu'un projet de résolution est à l'examen au Conseil de sécurité de l'ONU et que les pressions internationales s'intensifient sur le Soudan pour qu'il fasse cesser les violence au Darfour. En écho, le ministre des affaires étrangères soudanais, Moustafa Osman Ismal, a déclaré lors d'une visite à Paris qu'il ne comprenait pas pourquoi les Etats-Unis et la Grande-Bretagne "augmentaient systématiquement la pression" sur le Soudan.Propos aussitôt démentis par les Etats-Unis, à l'origine d'une résolution présentée à l'ONU. Prié de dire s'il était réellement pertinent de faire pression sur le gouvernement soudanais pour qu'il désarme des miliciens auxquels il a lui-même fourni leurs armes, Colin Powell, le secrétaire d'Etat américain, a répondu : "Puisqu'ils l'ont déclenché, ils peuvent l'arrêter." "Ce qui pour certains est de l'ingérence constitue, pour d'autres, une tentative de sauver des personnes dont la situation est désespérée", a-t-il déclaré aux journalistes.Les Etats-Unis ont soumis jeudi au Conseil de sécurité une résolution menaçant le Soudan de sanctions si le gouvernement ne traduit pas en justice les chefs des milices arabes "janjawids" accusées de viols, de meurtres et de pillages dans les villages de la communauté noire du Darfour. Le texte, qui ne spécifie pas quel type de sanction pourrait être imposée au Soudan, préconise également un embargo sur les ventes d'armes finissant dans les mains des milices susnommées et des autres groupes armés actifs dans le Darfour. Kofi Annan a fait savoir qu'il avait décelé un recul de l'hostilité au texte parmi les membres du Conseil de sécurité, où les Européens soutiennent les Etats-Unis, mais où la Russie, la Chine, le Pakistan ainsi que d'autres pays rechignent à faire pression sur le Soudan. "Je pense que le texte va passer" a déclaré le secrétaire général de l'ONU.PRESSIONS SUR L'ONULe Sénat américain ne s'est pas, pour sa part, prononcé sur la résolution votée à la Chambre des représentants, qui stipule que "les atrocités ayant lieu dans le Darfour, au Soudan, relèvent du génocide". Le texte exhorte le président américain, George Bush, à soutenir l'adoption d'une résolution de l'ONU qui imposerait des sanctions contre les auteurs d'atrocités dans le Darfour, autoriserait la création d'une force multinationale chargée de protéger les populations déplacées et le personnel des ONG actives dans la région, créerait une commission d'enquête sur les exactions et mettrait en place un processus de règlement des problèmes des habitants du Darfour.Les Nations unies ont présenté la situation dans le Darfour comme la pire crise humanitaire que connaisse le monde à l'heure actuelle, sans toutefois la qualifier de génocide, ce qui les contraindrait à agir. L'ONU estime que ce conflit, qui dure depuis quinze mois, a fait au moins 30 000 morts et chassé de leurs foyers un à deux millions de personnes.Colin Powell s'est rendu à New York pour discuter avec le secrétaire général de l'ONU des mesures à prendre pour mettre fin aux atrocités dans le Darfour et pour faire parvenir une aide d'urgence aux deux millions de personnes chassées de leurs villages. Le Soudan a promis il y a deux semaines à Kofi Annan de protéger les civils déplacés, de désarmer les milices et les autres groupes armés, de lever les restrictions de déplacement et de visas appliquées aux organisations humanitaires et de sanctionner les auteurs d'atrocités.LES RISQUES POUR KHARTOUMEn cas de non-coopération de la part de Khartoum dans un délai de trente jours, le texte de la résolution de l'ONU prévoit le recours à d'autres mesures, "y compris l'imposition de sanctions au gouvernement soudanais", sans en préciser la nature.Lors d'une visite de M. Annan début juillet, le Soudan s'était engagé à punir les personnes responsables des atrocités, désarmer les milices, laisser les organisations humanitaires circuler librement dans la région et permettre l'entrée d'observateurs de l'Union africaine (UA). Selon M. Powell, qui s'était lui aussi rendu au Soudan il y a quelques semaines, on constate "quelques progrès modestes en matière d'accès" aux zones de conflit. Mais, a-t-il ajouté, "nous ne sommes pas satisfaits de la situation sur le plan de la sécurité".Le rétablissement de la sécurité "est de la responsabilité du gouvernement soudanais", qui "a soutenu et aidé certains de ces éléments janjawids. Cela doit cesser", a-t-il dit. Bien que ne comportant pas de mécanisme automatique de déclenchement des sanctions, elle est jugée plus musclée qu'une première version présentée fin juin, déjà par les Etats-Unis, qui n'avait pas emporté l'adhésion du Conseil.Le ministre des affaires étrangères britannique, Jack Straw, se rendra le mois prochain au Soudan, une région en crise où plus d'un million de personnes ont été déplacées dans la province du Darfour, a annoncé un porte-parole gouvernemental. M. Straw va se rendre à Khartoum fin août et pourrait ensuite voyager au Darfour, a indiqué un porte-parole du Foreign Office. M. Straw a déclaré à des journalistes que Londres souhaite que l'Union européenne envoie une équipe associant des militaires et des civils pour aider l'Union africaine dans sa tâche. Le groupe pourrait comprendre du personnel britannique doté d'une expertise militaire, mais serait non combattant, a souligné le ministre.Avec AFP et Reuters
