Mort de Kerry PackerLe
Mort Kerry PackerLe magnat australien des médias Kerry Packer est mort à son domicile de Sidney, lundi 26 décembre. Il était âgé de 68 ans.C'était un Australien plus vrai que nature. Bourru, jurant sans cesse, ce géant de 130 kilos ressemblait davantage à un tondeur de moutons de l'arrière-pays qu'à un industriel bon chic bon genre à l'anglais châtié. "Kerry était l'un des hommes d'affaires les plus talentueux de sa génération", a déclaré son rival et compère, le magnat Rupert Murdoch, fondateur de News Corporation, à propos de cette figure emblématique de ce rude pays à la terre rouge.En trois décennies, à coups de flair et d'audace, le magnat de Sydney avait bâti Consolidated Publishing, holding tentaculaire regroupant de multiples entreprises de médias, de loisirs, d'internet, des casinos, des mines, des ranchs ainsi que des courtiers financiers.MISOGYNE DANS L'ÂME"Je me moque qu'on m'aime ou pas. J'ai quelque chose à accomplir, donc il faut être féroce" : comme l'indique son credo sans cesse martelé, à la tête d'un groupe privé, ce grand carnassier au regard perçant, terreur de ses collaborateurs, barricadé dans sa gigantesque propriété tanière de Bellevue Hill, n'avait de comptes à rendre à personne. Première fortune d'Australie après l'expatriation aux Etats-Unis de Rupert Murdoch, cet entrepreneur hors norme gérait son empire en parfait autocrate.Né le 17 décembre 1937 à Sidney, fils de l'éditeur sir Frank Packer, un chercheur d'or parti de rien, Kerry, qui s'était révélé nul en classe en raison d'une dyslexie aiguë, avait commencé sa carrière à l'âge de dix-neuf ans dans l'imprimerie du quotidien conservateur australien Daily Telegraph, le porte-drapeau familial.Mort en 1974, son père lui avait légué deux petites chaînes de télévision, cinq stations de radio, neuf quotidiens de province et une poignée de magazines. Dans les années 1980, dans un souci de diversification, ce boulimique s'était lancé dans l'immobilier, l'élevage de bovins et surtout l'industrie du jeu, la grande passion de ce flambeur invétéré.Grand sportif, Kerry Packer avait révolutionné le cricket et le rugby à treize, religions dans l'hémisphère Sud, en créant des compétitions parallèles organisées pour répondre aux besoins de sa chaîne de télévision, Channel Nine. En 1989, il avait défrayé la chronique en s'alliant avec deux autres francs-tireurs comme lui, Jimmy Goldsmith et Jacob Roth-schild, dans l'OPA avortée sur BAT Industries, troisième groupe britannique à l'époque.Ce joueur dans l'âme avait réalisé alors un joli coup financier. En octobre 1990, Packer avait échappé de peu à la mort à la suite d'un arrêt cardiaque de huit minutes lors d'une partie de polo. En sortant du coma, le miraculé avait eu cette formule célèbre : "Je suis passé de l'autre côté et je peux vous affirmer qu'il n'y a rien dans l'au-delà, absolument rien."Ce réactionnaire, misogyne dans l'âme, marié à Ros, une amie d'enfance, dont il avait eu deux enfants, s'était fait le champion d'un protectionnisme aux relents xénophobes. Mais les arcanes des milieux politiques de Canberra n'avaient aucun secret pour l'impérieux homme d'affaires. De solides amitiés au sein du Parti travailliste, au pouvoir dans les années 1980-1990, lui avaient permis de se jouer de la loi interdisant le contrôle à la fois d'une station de télévision et d'un quotidien dans un même Etat.C'est ainsi que Kerry Packer avait couronné sa formidable carrière en mettant la main sur le groupe rival Fairfax, éditeur du célèbre Sydney Morning Herald, son ennemi juré. Son fils Jamie avait pris les commandes de la société en 1998, dans la foulée d'un deuxième accident cardiaque.