Mort de Josette Rey-Debove

Mort Josette Rey-Debove, linguiste et lexicographe Josette Rey-Debove, linguiste et lexicographe, est morte subitement, mardi 22 février, alors qu'elle était en vacances au Sénégal. Elle était âgée de 75 ans. Née le 16 novembre 1929 à Calais, Josette Rey-Debove alliait une compétence aiguë de lexicographe à une capacité de construction théorique qui faisait d'elle une des meilleures spécialistes du lexique, et ce dans plusieurs domaines. A partir du Grand Robert (1953-1964), puis du Petit Robert, ouvrages rédigés avec Alain Rey, ses recherches sur le lexique ont été à la fois originales et complémentaires de celles de son époux : à lui, le sens culturel des mots, leur histoire, le travail à la limite des mots et des choses ; à elle, la description des structures lexicales en synchronie, la déconstruction des mots en éléments, et le travail aux frontières de la forme et du sens. La rédaction des dictionnaires de langue a été pour Josette Rey-Debove un tremplin pour ses travaux théoriques. Sa thèse de troisième cycle ("Etude linguistique et sémiotique des dictionnaires français contemporains", 1971) valait bien des thèses d'État : elle y théorise le travail accompli depuis des siècles par les auteurs de dictionnaires de langue. C'est à partir de là que Josette Rey-Debove conçoit le Robert Méthodique (1982), qui rompt avec l'ordre alphabétique strict pour rendre compte de l'organisation morphosémantique des mots français, et qu'elle rédige sa thèse d'Etat sur Le Métalangage (Le Robert, 1978 ; Armand Colin, 2e éd. augmentée 1997), ouvrage essentiel d'un point de vue historique et épistémologique, qui porte sur la dimension sémiotique du langage. Entre élaboration de dictionnaires et construction théorique, ses interrogations sur le signe l'ont ensuite entraînée à travailler dans deux sens. Vers l'intérieur du signe, et l'on peut dire que son rôle dans le renouveau actuel de la morphologie a été décisif. A l'inverse, allant du mot au discours, le concept de "connotation autonymique" l'a amenée à analyser l'hétérogénéité du langage. A partir de l'opacité des mots dont parle le dictionnaire, on va beaucoup plus largement : vers celle du langage que l'on montre ; vers le discours rapporté ; vers les cadres de l'énonciation et singulièrement ceux de la littérarité. Par ses articles et ses ouvrages, en particulier dans la somme que constitue La Linguistique du signe (Armand Colin, 1998), et par le séminaire qu'elle assurait à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (Ehess) depuis quelques années, Josette Rey-Debove a remis le mot au centre du travail linguistique, et de ce centre a rayonné dans trois directions essentielles : le domaine métalinguistique (le métalangage), la structuration du lexique français, et l'organisation interne des mots (la morphologie).