Manifestation Importante mobilisation des salariés français pour la RTT et le pouvoir d'achat Autour du thème fédérateur des 35 heures, c'est l'ensemble de la politique sociale du gouvernement que les manifestants ont mise en cause, samedi, à travers des dizaines de manifestations partout en France. Ces manifestations ont rassemblé entre 300 000 participants, selon des sources policières, et 600 000, selon des chiffres communiqués par les syndicats. En plein débat parlementaire sur l'assouplissement des 35 heures, des dizaines de milliers de personnes ont manifesté, samedi 5 février dans toute la France, contre la politique sociale du gouvernement Raffarin. Pour toute la France, la police nationale a avancé le chiffre provisoire de 300 000 manifestants. Selon un décompte de la CGT, plus de 600 000 personnes ont défilé au total dans quelque 120 manifestations. La manifestation parisienne, partie à 14 h 30 de la place de la République, rassemblait quelque 90 000 personnes, selon les syndicats, soit près du double de celle du secteur public, le 20 janvier. La police n'a compté que 30 000 manifestants. Derrière une banderole de tête proclamant "35 heures, salaires, emploi, code du travail : ensemble, public-privé", les deux pôles du syndicalisme français ont remisé leurs divisions pour défiler côte-à-côte. THIBAULT : DES "DISCUSSIONS (...) DÈS LUNDI" "Le malaise social grandit dans notre pays et le privé est très présent dans les cortèges. Le gouvernement ferait bien, non seulement d'écouter, comme il le dit, mais d'entendre", a déclaré le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault, au départ de la manifestation. "Après le succès de cette journée, il y aura des suites coordonnées, soit par branche, soit au plan interprofessionnel. En tout cas, la CGT va s'y consacrer", a-t-il ajouté. "Contrairement à 2004 (sur les retraites), les syndicats sont davantage prêts à se mobiliser ensemble", a souligné Bernard Thibault, qui a exprimé sa confiance dans la possibilité de "forcer le gouvernement à modifier sa politique". Il s'est prononcé pour des "discussions dans les grandes entreprises dès lundi". "Les salariés du privé sont au rendez-vous des manifestations. Ils demandent au gouvernement de les entendre et de revoir profondément cette loi, qui ne règle pas les problèmes et qui est un mensonge vis-à-vis des salariés qui n'auront pas de choix demain dans les entreprises", a dit le secrétaire général de la CFDT, François Chérèque. "Les chiffres des manifestations depuis ce matin montrent que la barre des 300 000 (manifestants) sera dépassée et que cete journée va être réussie", s'est-il félicité, affirmant : "Il faut que le premier ministre entende, retire ou modifie son projet de loi" sur les 35 heures. UN CATALOGUE DE REVENDICATIONS Les salariés du secteur privé étaient bien présents dans le cortège parisien pour défendre le maintien de la semaine de travail à 35 heures. Mais le mot d'ordre "Augmentez les salaires, pas les horaires" n'est qu'un des slogans. C'est tout un catalogue de revendications qu'égrenaient les manifestants, contre les réformes Fillon sur l'école et la recherche, contre la réforme des retraites de 2003, contre l'assouplissement du code du travail ou encore contre "l'axe Raffarin-Medef". Le traité constitutionnel européen, même si les organisations syndicales disent refuser tout amalgame, faisait aussi partie des griefs. Le camp du "non" au prochain référendum s'était invité dans le cortège et nombre de manifestants criaient haut et fort qu'ils refuseront une "Europe trop libérale". Les manifestations étaient organisées à l'appel de la quasi-totalité des organisations syndicales (CGT, CFDT, FO, CFTC, FSU, Unsa et G10-Solidaires). L'ensemble de la gauche, notamment le Parti socialiste au créneau à l'Assemblée nationale pour défendre les lois Aubry, s'était greffée au mouvement. HOLLANDE RÉCLAME LE RETRAIT DU TEXTE Dans la matinée de samedi, plusieurs dizaines de milliers de personnes avaient déjà défilé en province, notamment à Toulouse (12 000 selon la police, 20 000 selon les organisateurs) et Bordeaux (20 000 à 23 000). Importants défilés également à Lille (entre 10 000 et 15 000), Lyon (entre 7 500 et 15 000), Montpellier (entre 6 500 et 10 000), Saint-Etienne (entre 4 et 10 000 manifestants), Metz (de 2 600 à 6 000), Strasbourg (entre 3 500 et 5 000), Mulhouse (2 000 environ). A Rennes, entre 10 000 et 15 000 personnes ont manifesté, selon les organisateurs, avec la participation du premier secrétaire du Parti socialiste, François Hollande, en porte-à-faux avec certains manifestants qui criaient leur intention de voter "non" au référendum sur le traité européen. "Je demande au gouvernement de retirer des débats le texte actuellement en discussion au Parlement et d'ouvrir une négociation avec les syndicats sur le temps de travail", a déclaré M. Hollande à l'issue du défilé. Tout l'Ouest s'est fortement mobilisé. Dans le Finistère, ils étaient 1 700 manifestants à Brest selon la police, 4 000 selon les organisateurs. A Quimper, ils étaient 3 000 selon la police, 4 000 selon les manifestants. A Saint-Brieuc (Côtes-d'Armor), 3 000 personnes ont défilé selon la police, 7 000 selon les organisateurs. Enfin, à Lorient (Morbihan), ils étaient 6 000 selon les organisateurs, entre 3 500 et 4 000 selon la police, et à Vannes 3 500 selon les organisateurs, entre 2 000 et 2 500 selon la police. En Pays-de-la-Loire, plus de 15 000 personnes ont manifesté à Nantes selon les organisateurs, 10 000 selon la police. A Saint-Nazaire, ils étaient également 5 000 selon les organisateurs, 3 000 selon la police. Au Mans (Sarthe) : 13 à 15 000 manifestants selon les organisateurs, 5 500 selon la police. A Laval (Mayenne), la police a comptabilisé 2 000 manifestants, et les organisateurs 2 500. A Angers (Maine-et-Loire), 4 000 personnes ont défilé selon la police, 5 000 selon les syndicats. Exemple de mobilisation du privé, des milliers de personnes (3 000 selon la police, 3 500 selon les syndicats) ont manifesté devant l'usine Arkema (Total) de Saint-Auban (Alpes-de-Haute-Provence), où la direction vient d'annoncer la suppression de 380 emplois sur 713. A Nancy, le service des autobus et tramways du réseau de transports en commun n'était assuré samedi après-midi qu'à 37 % en raison d'une grève des conducteurs. L'IDÉE D'UN "GRENELLE DES SALAIRES" Jean-Christophe Le Duigou, secrétaire confédéral de la CGT, a déclaré samedi que sa centrale syndicale souhaitait l'organisation d'un "Grenelle des salaires", afin de donner une "forte impulsion" politique au traitement du dossier des rémunérations. M. Le Duigou affirme que "la France est le premier pays au monde pour la productivité horaire du travail" mais "le quinzième pour le coût salarial horaire". Or, selon lui, "les entreprises, en tout cas les plus grandes, ont aujourd'hui un niveau de profit qui leur permettrait d'augmenter les salaires". Il fait ainsi valoir les "35 milliards d'euros de dividendes" et "près de 8 milliards" versés "en rachat d'actions" par les entreprises du CAC 40. Le secrétaire de la CGT juge que la revalorisation des salaires est "une condition pour développer l'emploi". Lemonde.fr (avec AFP et Reuters)