Anniversaire Il y a 20 ans, la catastrophe de Bhopal Le plus grand accident industriel de l'histoire s'est produit en Inde, le 3 décembre 1984. La fuite de gaz toxique, qui a provoqué des milliers de morts, continue de ravager des centaines de milliers de vies. Il est environ minuit et demi ce 3 décembre 1984 à Bophal, dans le centre de l'Inde, quand quelque 40 tonnes de gaz toxique s'échappent de l'usine américaine de pesticides Union Carbide. Un large volume d'eau mêlé à des composants toxiques s'est introduit dans un réservoir d'isocyanate de méthyle. La réaction chimique est telle que la valve de sécurité explose, libérant le gaz mortel, qui se dégage sur 20 km2. Nuage jaune Des centaines de milliers d'habitants sont réveillés par des picotements dans les yeux, des quintes de toux. Ils se souviennent d'une odeur de piment, d'un nuage jaune, puis d'une fuite affolée. "Dehors, une foule courait en criant, les yeux et les poumons brûlaient, le nez et les yeux coulaient, les corps se vidaient de tous leurs fluides", raconte Champadevi Shukla, 52 ans. Au moins 3.500 personnes meurent, essentiellement de suffocation, les premiers jours. Quelque 15.000 sont décédées depuis suite à des maladies liées à l'inhalation du gaz. Il a provoqué une déficience du système immunitaire qui entraîne aujourd'hui encore le développement de maladies comme le cancer ou la leucémie. Jusqu'à 800.000 ont été affectées d'une façon ou d'une autre, selon des chiffres officiels. Aujourd'hui, on continue de mourir à Bhopal. "Dix à 15 personnes meurent chaque mois du fait de l'inhalation du gaz, essentiellement pour défaillances respiratoires et cardiaques", affirme le Dr Mohammad Ali Qaser de la clinique Sambhavna. Batailles juridiques Depuis 20 ans, la lutte des associations pour leur indemnisation n'a jamais cessé. Après une longue bataille juridique, Union Carbide (rachetée depuis par Dow Chemical) avait versé 470 millions de dollars au gouvernement indien aux termes d'un accord conclu en 1989. Mais seule une petite partie avait été versée aux victimes, l'autre ayant été placée sur un compte bloqué. Après des années de manifestations et un recours devant la Cour suprême, les associations ont obtenu en juillet 2004 seulement que les versements reprennent. Mais désormais, elles exigent plus. Le dossier criminel aussi est bloqué : 17 ans après le lancement de la procédure, toujours pas de procès. Le principal accusé, l'ex-directeur de Union Carbide en Inde, Warren Anderson, n'a pas paru devant la justice indienne en dépit d'un mandat d'arrêt lancé en 1992 pour homicide, puis d'une demande d'extradition en 2003, rejetée par le gouvernement américain. Quant au site, il est toujours abandonné, tel quel. Des masses de déchets y sont entreposées et l'eau qui alimente en partie les bidonvilles jouxtant l'usine est polluée, de l'aveu même des autorités régionales. Commémoration A la tombée de la nuit, des victimes et familles de victimes devaient lancer la commémoration de la catastrophe lors de deux retraites aux flambeaux, en deux points différents de la ville, tandis qu'un film, Bhopal Express, devait être projeté en plein air près du site de l'usine abandonnée.