Grève Grève aujourd'hui dans les cabinets et les secteurs privés des hôpitaux et PMI. Les pédiatres de ville ? Indéniablement, c'est une race à part. Voilà des médecins spécialistes qui, même après onze ans d'études, supportent de très longues journées de travail et estiment ne pas franchement rouler sur l'or. Ils ont en tout cas la particularité d'être les spécialistes libéraux aux plus faibles revenus (lire ci-contre). A l'heure où la médecine de ville se sent mal aimée, mal considérée et insuffisamment rétribuée, ils ont décidé de commencer l'année par une journée de grève. A l'appel du Syndicat national des pédiatres français (SNPF), ils organisent aujourd'hui une «journée sans pédiatres». Objectif : demander des revalorisations d'honoraires et sensibiliser le public aux menaces de «disparition» qui pèsent, selon eux, sur leur profession. A la veille de cette journée, le ministre de la Santé a tendu la main à ces spécialistes. «On a envie de renouer le dialogue avec les pédiatres», a déclaré Philippe Douste-Blazy hier soir au micro du Grand Jury RTL-le Monde-LCI. Le ministre a annoncé qu'il sera «attentif» à leur demande de rémunération des gardes dans les services de néonatologie. Mais le SNPF a d'autres sujets de revendications. Ce syndicat, qui revendique 1 800 adhérents, appelle ces médecins spécialisés dans les soins aux bébés et enfants (jusqu'à 16 ans) à cesser le travail dès 8 heures jusqu'à demain 8 heures. Sont prévues : la fermeture des cabinets en ville, la «cessation totale d'activité» des pédiatres libéraux (secteur privé) exerçant dans les hôpitaux, cliniques et centres de protection maternelle et infantile (PMI), et la «grève totale de la permanence des soins de ville et des astreintes et gardes en maternités privées». Alarmistes. «Au moins 75 % des maternités seront fermées», a assuré à l'AFP le président du SNPF, Francis Rubel. «C'est un cri d'alarme que nous lançons : il faut que le public comprenne ce que sera la France sans les pédiatres, quand ils auront disparu.» Propos alarmistes et légèrement exagérés. Mais il est vrai que la place de la pédiatrie de base est fragilisée à l'heure où se met en place une réforme de l'assurance maladie : celle-ci vise, notamment, à mieux coordonner le système de soins en ville autour du médecin traitant, qui, logiquement, devrait être le médecin généraliste de base. Les pédiatres se sentent laissés sur le bord de la route Certes, le patient pourra toujours prendre un pédiatre comme médecin traitant, mais cela sera-t-il le cas ? Car c'est une particularité de la médecine française que d'avoir confié les soins de base apportés au nourrisson et à l'enfant à une spécialité médicale; dans bon nombre de pays occidentaux, la santé de l'enfant est prise en charge par les généralistes. Qui plus est, la pédiatrie libérale n'est plus attractive, notamment sur le plan financier. «Les étudiants ne la choisissent plus», déplore Francis Rubel, estimant que la pédiatrie libérale perd chaque année 100 à 150 retraités non remplacés : «En 2010, on aura 40 % de pédiatres libéraux en moins.» La profession a pourtant obtenu, en 2002, une revalorisation d'environ 5 euros de la consultation pour les enfants âgés de 0 à 2 ans, la portant à 28 euros. A la faveur des négociations de décembre, les consultations passeront, courant 2005, de 28 à 30 euros pour les enfants de 0 à 2 ans, et de 25 à 27 euros pour les enfants plus âgés. «Cela est largement insuffisant», répond le SNPF, pourtant affilié à la CSMF, l'un des trois syndicats à avoir signé le texte. «Et injuste», insiste le syndicat, qui juge ces revalorisations médiocres en regard de celles obtenues par les autres spécialistes et les généralistes. En effet, ces derniers toucheront 25 euros, au lieu de 20, pour tout examen «complet» du nourrisson. Fermeture. Après les chirurgiens et les autres spécialistes, ils estiment, donc, n'avoir pas été entendus. Amine Arsan, installée dans le XIIIe arrondissement à Paris, va fermer son cabinet pour la journée. Comme bon nombre de ses collègues. Dans le quartier, quatre pédiatres sont partis à la retraite, un seul a été remplacé.