Accuser Gloria Arroyo rattrapée par les scandales Empêtrée dans un scandale de fraude électorale, sous le coup d'une procédure en destitution, la présidente philippine, Gloria Macapagal Arroyo, croit avoir trouvé la parade : exiler son mari. En «sacrifiant son bonheur personnel», en éloignant du pays «pour une durée indéterminée» José Miguel, accusé de trafic d'influence, la «dame de fer philippine» espère désamorcer la crise politique. Son fils, également accusé d'avoir empoché des pots de vin du «jueteng», une loterie clandestine, a déjà abandonné son siège de député. Le ministre philippin de l'Agriculture a démissionné hier pour une affaire de fraude fiscale. Et la présidente devrait annoncer un remaniement ministériel. Rien n'y fait. Après quatre ans au pouvoir, la présidente Arroyo atteint des records d'impopularité. Et l'entrée en vigueur aujourd'hui de la nouvelle législation fiscale, qui prévoit une augmentation de 10% de la TVA pour renflouer les caisses de l'Etat ne va pas arranger les affaires de cette économiste de 58 ans formée aux Etats-Unis. Le peso et la Bourse continuent de chuter. Les appels à la démission se multiplient. Ses alliés la lâchent les uns après les autres. Son ancien conseiller à la sécurité Roilo Golez abandonne la présidence de la commission de la défense à la chambre des représentants. «Ma loyauté au parti cesse là où ma loyauté à mon pays commence», a-t-il dit en parlant du «Gloriagate», ces mystérieuses cassettes censées provenir des renseignements militaires dont on achète les copies dans les rues de Manille. Dans ces enregistrements, Gloria Arroyo ferait pression sur un agent électoral pour obtenir une marge d'un million de voix lors de sa reconduction en mai 2004 à l'issue d'un décompte des voix très laborieux. La présidente a fini par reconnaître lundi à la télévision avoir téléphoné à un commissaire électoral après le scrutin présidentiel. Mais elle nie avoir triché pour assurer sa victoire. Golez demande que l'on entende la version du commissaire électoral. Mais celui-ci a disparu. Le climat délétère fait craindre un glissement progressif vers l'anarchie. «C'est un complot méthodique pour renverser le gouvernement», estime l'analyste politique Amando Doronila. Arroyo ne manque pas d'ennemis : généraux à la retraite, fidèles du président Joseph Estrada, tombé en 1991, membres de la famille du dictateur Ferdinand Marcos, organisations gauchistes... Bref, «une flopée de déstabilisateurs veulent la peau de la présidente et la pilonnent sans merci. Ils trouveront bien encore un ou deux scandales à révéler au public». Si les Philippins ne se reconnaissent plus dans leur présidente, la peur d'un vide politique hante leurs esprits : depuis la mort de Fernando Poe en décembre dernier, le rival d'Arroyo aux dernières élections, l'opposition est à la dérive. Elle n'a d'ailleurs pas réussi à mobiliser les foules ces dernières semaines. Et les chances d'aboutir de la procédure en destitution sont faibles.«Ça n'est pour l'instant qu'une tempête de boue mais la présidente va devoir se débattre pour ne pas être ensevelie», résume l'analyste politique Nelson Navarro.
