Mort de Gary Bertini

Mort Gary Bertini- le chef d'orchestre franco-israélien Gary Bertini est mort brutalement, jeudi 17 mars, dans sa maison de Tel-Aviv (Israël), des suites d'un lymphome. Il était âgé de 77 ans. Homme de culture, pétri d'humanisme et d'une courtoisie rare, il laisse le souvenir d'un musicien charismatique aux activités cosmopolites, d'un bâtisseur infatigable à l'énergie hors du commun. Il enseignait régulièrement à l'université de Tel-Aviv depuis 1958. Gary Bertini était né le 1er mai 1927 à Brichevo, en Union soviétique, puis avait passé son enfance en Palestine, où il avait commencé le violon dès l'âge de 6 ans. Elève aux conservatoires de Milan puis de Paris de 1951 à 1954, il étudie la direction d'orchestre, la musicologie et la composition dans les classes d'Arthur Honegger et d'Olivier Messiaen. Rentré en Israël, Gary Bertini créé le Chœur Rinat, qui deviendra le Chœur de chambre d'Israël. C'est à la tête de l'Orchestre philharmonique d'Israël qu'il fait ses débuts en 1955. Cinq ans plus tard, Gary Bertini effectue avec cette phalange une tournée triomphale aux Etats-Unis. Mais c'est en fondant en 1965 l'Orchestre de chambre d'Israël, dont il sera le directeur musical dix ans durant, que sa carrière prend une véritable dimension internationale. En 1977, il est nommé à la tête de l'Orchestre symphonique de Jérusalem, où il reste jusqu'en 1986. Parallèlement, il occupe les fonctions de conseiller musical au sein de l'Orchestre symphonique de Detroit (1981-1983), avant de devenir directeur de l'Orchestre de la radio de Cologne WRD (1983-1991). Dès 1987, Gary Bertini est appelé aux postes d'intendant et directeur musical de l'Opéra de Francfort (jusqu'en 1990), et à ceux de directeur musical et général du Nouvel Opéra d'Israël à Tel-Aviv, où il effectuera durant dix ans un travail remarquable, avant d'accepter en 1998 la direction du Tokyo Metropolitan Symphony Orchestra. Gary Bertini a marqué de sa présence artistique les très grands orchestres qu'il était régulièrement invité à diriger (laPhilharmonie de Berlin, les orchestres philharmoniques de New York, Philadelphie, Londres, Vienne et Munich, Paris et Milan). A Paris, où il possédait un appartement, Gary Bertini a été l'hôte privilégié de l'Opéra de Paris. Invité dès 1975 par Rolf Lieberman, il dirige la reprise d'Ariane et Barbe-Bleue de Paul Dukas, avant de devenir, dès 1996, l'un des piliers de l'Opéra Bastille, où il assure en neuf ans, jusqu'en 2004, pas moins de dix productions ­ de Britten à Philippe Fénelon (dont il crée, en 1998, la Salammbô), en passant par Mozart, Verdi, Berlioz, Massenet et Prokofiev. C'est lui qui dirige pour la première fois à Paris en février 2000 le monumental opéra La Guerre et la Paix mis en scène par Francesca Zambello (un DVD a été publié chez TDK). Egalement chez lui en Italie, Gary Bertini s'est taillé quelques francs succès à la Scala avec le Doktor Faustus de Manzoni en 1989, Manon de Massenet en 1999, et plus récemment Samson et Dalila de Saint-Saëns, en 2002, avec Placido Domingo. Il remporte consécutivement en 1995 et 1996 le fameux prix Abbiati du " meilleur chef d'orchestre de l'année ", avant de recevoir le titre de membre honoraire de l'Académie Sainte-Cécile de Rome. Depuis 2004, Gary Bertini était directeur musical du Théâtre de San Carlo à Naples. CITOYEN DU MONDE Résolument en accord avec son temps, Gary Bertini a créé de nombreuses œuvres de musique contemporaine : Luigi Dallapiccola (Exhortatio), Mauricio Kagel (Fragende-Ode et Liturgien), Darius Milhaud (Cantate de l'initiation), Wolfgang Rihm (Chiffres V et Abkehr), etc. Non content de servir les autres, il a également composé une cinquantaine d'œuvres de musique de chambre, ballets et musiques de film, et enregistré de nombreux disques pour les maisons de disques CBS, RCA, Harmonia Mundi, Orfeo et EMI chez qui il a notamment gravé une belle intégrale des œuvres de Mahler. Citoyen du monde, certes, Gary Bertini, qui parlait neuf langues, l'était plus que tout autre. Le 17 septembre 2001, il avait interprété le Requiem de Mozart à la Gedächtniskirche de Berlin avec l'Orchestre symphonique allemand pour un concert en mémoire des victimes de l'attentat du 11 septembre 2001 à New York, lequel a été radiodiffusé dans toute l'Europe. Mais il venait de boucler la boucle, il y a quelques semaines, en dirigeant pour la première fois à Moscou et Saint-Pétersbourg ­ dans son pays natal, la Russie, où il n'était jusqu'alors jamais retourné.