Annonce FootballLes juges entrent sur le terrain des transfertsInquiétude grandissante dans le milieu du foot: la justice enquête sur le système généralisé d'évasion fiscale et de rémunérations occultes fondé sur les ventes de joueurs.C'est peu dire que le football français ne tourne plus rond. L'argent a depuis longtemps pris le pas sur la logique sportive, mais la nouveauté, c'est que le microcosme ne peut plus couvrir ses affaires en famille. Comme dans le cyclisme en matière de dopage, la justice pénale effectue une entrée fracassante dans le foot-business.L'essentiel tourne autour de la question des agents, ces intermédiaires entre clubs et joueurs professionnels, qui contribuent à l'explosion des transferts. Les supporters peinent à s'y retrouver au gré de l'incessante valse des effectifs, pendant que gonflent des comptes bancaires dans les paradis fiscaux. Les commissions perçues par les agents donnent parfois lieu à rétro-commissions, rémunérant ceux qui pensent avoir contribué à faire flamber la valeur d'un joueur (entraîneurs, dirigeants...). Le prix d'un transfert ne reflète plus une valeur intrinsèque mais le montant que sont prêts à se partager les protagonistes. Les clubs, en tant que sociétés anonymes, en ressortent exsangues ? Peu importe, si certains dirigeants y retrouvent leur compte. En termes judiciaires, cela se traduirait par abus de biens sociaux car les clubs paient plus cher qu'ils ne devraient les transferts et fraude fiscale ou sociale car une partie du surplus est répartie au noir.Laisser-faire. Quatre affaires pénales sont en cours. Dans le seul cas de l'OM, les policiers estiment que 100 millions de francs ont été détournés sous l'ère de l'entraîneur Rolland Courbis (1997-1999), en toute connaissance de cause du président Robert Louis-Dreyfus. A Bastia, au détour de l'instruction sur l'ancien leader nationaliste Charles Pieri, l'enquête tourne autour d'une commission répartie, au choix (chacun se renvoie la balle), entre joueurs, responsables du club et agents. Affaires typiquement azuréennes ? A Lyon, une instruction vise des transferts entre la capitale des Gaules et l'Angleterre. A Paris, une enquête préliminaire vient d'être ouverte sur le PSG.La tutelle du football, n'étant pas à l'origine de ces procédures, est contrainte de prendre le train en marche. Elle se décompose en une fédération (FFF), garante de l'équilibre entre amateurs et professionnels, une ligue (LNF), représentante de l'intérêt des clubs pros, et un ministère, celui des Sports, qui délègue son pouvoir pour mieux ne pas se mouiller. De son laisser-faire, la tutelle tente de faire une vertu : impuissante à freiner les malversations, elle appellerait le pénal de ses voeux pour remettre de l'ordre.Lettre anonyme. La FFF est tout de même à l'origine d'une cinquième et dernière affaire en cours. Tout a pourtant commencé par une lettre anonyme, en février dernier, un agent écrivant tout haut ce qui se murmurait tout bas. Premier barouf, qui pousse la Fédération a déposé plainte en avril. Pas bien grosse, la plainte : simple, sans constitution de partie civile (à base de coupures de presse car la «Fédé» ne peut pas tout savoir) et qui ne vise que cinq agents, pour de simples histoires de statut. Un an plus tôt, Philippe Piat, président du syndicat des joueurs (UNFP), suggérait à la FFF, «dans le but d'assainir, si c'est possible, l'activité d'agents, de bien vouloir respecter» la loi, un exemplaire étant aimablement fourni en pièce jointe.
