Mort de Fernanda de Utrera

Mort Fernanda de Utrera, cantaora andalouse Née en Andalousie en 1923, Fernanda de Utrera vient de mourir, à 83 ans, après une vie dédiée au chant flamenco. Depuis des années, elle souffrait de la maladie d'Alzheimer. On la tient pour la meilleure spécialiste de solea de tous les temps. Sur la route de Séville à Jerez de la Frontera, sur la route du Sud, Utrera est un mystérieux village blanc. Autour, des oliviers, des journaliers et des taureaux. Ici, à chaque pas de porte, une famille de chanteurs, de danseurs et de guitaristes veille sur le chant profond. "Chanteuse" ne convient pas. "Cantatrice" est trop réservé. Fernanda de Utrera, comme sa soeur Bernarda, était cantaora. Pour l'état civil, on l'appelait Fernanda Jimenez Peña. Mais, chez les Gitans andalous, l'état civil n'a qu'une valeur subalterne. Bien plus important, le fait que son grand-père fût El Pinini, fondateur de dynastie artiste, et que de proche en proche on ne trouve autour d'elle que les plus grands noms du cante et du baile (la "danse"). En compagnie de sa soeur ou seule, Fernanda excellait dans les formes majeures du flamenco, mais se dépassait dans les tangos, les cantiñas et surtout les soleas. Soit dans les formes poignantes les plus strictes. Couverte de prix, de concours et de titres, on la considérait toutefois, dans ces formes terribles, comme irrégulière, ce qui fait partie du genre. Elle-même souffrait à l'extrême d'une solea qui lui avait résisté un soir, qu'elle n'avait pas rejointe bien qu'elle eût étalé son coeur tout ouvert, et devant qui elle avait perdu la bataille. Car il s'agit de cela : non pas pousser un cri ou un chant, mais vérifier que le chant vous attend ce soir-là. Ou qu'il vous refuse. Pour le critique Manolo Bohorquez, " nous continuions de l'adorer parce que nous étions pleinement convaincus qu'elle représentait encore le peu de vérités qui restent au chant gitan." Exagéré, bien sûr, mais pas plus que le cante.