Nouveau/elle Elu à la tête du PLD, il prendra ses fonctions de Premier ministre le 26 septembre.Shinzo Abe, un «faucon» pour la grandeur du JaponA droite toute ! Sans surprise, le Parti libéral démocrate (PLD), formatio historique au pouvoir au Japon depuis 1955, a plébiscité hier à sa tête, pou trois ans, un de ses ténors les plus radicaux : le «faucon» Shinzo Abe, u politicien ultraconservateur, moins populiste que son prédécesseur Junichiro Koizumi, mais tout aussi nationaliste que lui. Sa nomination en tan que Premier ministre interviendra le 26 septembreA 52 ans, Shinzo Abe a beau être le plus jeune Premier ministre japonais jamais élu le premier aussi à être né après la guerre , nombreux sont ceux, chez ses opposants, et parmi certains jeunes députés de son camp, à l'accuser de défendre «des idées de vieux», d'être moins moderne et pragmatique que ne l'était le bouillant Koizumi. «Shinzo est un homme sans envergure. Il n'y a rien à attendre de sa façon de gouverner, grince Tadashi Inuzuka, jeune et brillant sénateur du parti Minshuto (opposition), de retour d'une mission au Darfour. Comme Koizumi, il alignera la diplomatie du Japon sur celle des seuls intérêts américains, et d'un point de vue macroéconomique, défendra la même ligne, ultralibérale, que son prédécesseur.» Un changement, donc, mais marqué du sceau du conformisme.Introverti tourmenté. C'est dire si dans un Japon en transition, deuxième puissance économique mondiale, où les profits des entreprises explosent, Shinzo Abe devra travailler dur pour gagner la faveur d'un électorat devenu très capricieux. Nombre d'experts, au Japon, estiment ni plus ni moins qu'il devra «faire du Koizumi». Alors qu'il n'a ni le style ni le panache de son prédécesseur. Et encore moins sa faculté à manipuler les médias nippons, surtout la télévision. Koizumi était un as télégénique, un professionnel du spectacle. Abe évoque plus un introverti tourmenté. Orthodoxe en économie et traditionaliste en politique. Il entend prendre de nouvelles mesures pour alléger «le poids de l'Etat sur l'économie». Il espère en outre «affirmer l'autorité du Japon» sur la scène internationale. Il a promis de réviser la Constitution pacifiste du pays. Objectif : offrir à l'armée une plus grande liberté d'action. Abe défend en outre les «valeurs sacrées» du Japon. Il renforcera, a-t-il prévenu, le patriotisme dans les écoles. Il n'a jamais critiqué le révisionnisme très en vogue au Japon. Et expliquait, hier, vouloir «entretenir la flamme nationale». Pas sûr que le Japon obtienne ainsi ce qu'il désire le plus ardemment : une grande réforme de l'ONU et un siège de membre permanent au Conseil de sécurité. Ce pas de géant, en effet, ne peut passer, dans un premier temps, que par le renforcement des liens diplomatiques avec la Chine, pour l'heure très tendus alors qu'elle est devenue le premier partenaire commercial du Japon.La tâche s'annonce d'autant plus compliquée que Abe, homme sans véritable expérience, un peu aguerri à la diplomatie son père fut ministre des Affaires étrangères compte dans sa généalogie un ancêtre quelque peu encombrant : il est en effet le petit-fils de Nobusuke Kishi, un criminel de guerre miraculeusement épargné par les Américains et la CIA, qui réussit à devenir, de 1958 à 1960, Premier ministre.Sanctuaire. Depuis 2001, les visites répétées de Koizumi au sanctuaire de Yasukuni, à Tokyo (où sont honorés, parmi les morts au combat, 14 criminels de guerre), ont profondément détérioré les liens avec Pékin et Séoul. Or, pour l'heure, rien ne laisse espérer une inflexion. Abe ne semble guère favorable à une désacralisation du sanctuaire shinto réclamée par des membres de son parti. Et encore moins à ordonner l'éviction du lieu des noms des criminels de guerre.Pas encore en fonction, Shinzo Abe fait déjà face à un sérieux problème : sa versatilité. Il y a un mois, il assurait être en mesure de convaincre le leader nord-coréen, Kim Jong-il, de devenir fréquentable en le poussant à abandonner son programme nucléaire et de missiles balistiques. Entre-temps, en représailles aux sept tirs de missiles nord-coréens du 5 juillet, Abe a encouragé et participé à l'élaboration du nouveau plan de sanctions économiques à l'encontre de Pyongyang. Annoncé hier à Tokyo, ce plan prévoit le blocage des transferts de fonds nord-coréens du Japon vers la Corée du Nord. Nul doute que face à ce durcissement, Kim Jong-il pourrait se montrer plus menaçant encore. En donnant par exemple son feu vert à un premier test nucléaire nord-coréen. Shinzo Abe promet de faire preuve d' «audace diplomatique». Il en aura, il est vrai, beaucoup besoin.
