Attentat Egypte :Au moins 88 personnes ont été tuées et une centaine d'autres blessées dans une série de sept attentats, perpétrés dans la nuit du vendredi 22 au samedi 23 juillet en plusieurs endroits de la station balnéaire égyptienne de Charm el-Cheikh, sur la mer Rouge, selon un bilan de sources hospitalières publié samedi après-midi. Une bombe explose au Caire Une bombe de faible puissance a explosé dimanche dans un faubourg du sud-ouest du Caire, blessant grièvement l'homme qui la transportait, a-t-on appris de sources policières. Cette explosion due apparemment à une bombe à clous de conception grossière s'est produite dans l'entrée du bâtiment où réside le porteur de bombe, ajoutent ces sources. Il s'agiraissait d'un employé de l'hôpital Kasr el-Ainy, situé dans le centre de la capitale égyptienne. [-] fermer Dans la journée, les forces de l'ordre égyptiennes ont lancé une chasse à l'homme, arrêtant des dizaines de personnes dans le Sinaï, selon des sources sécuritaires. Ces rafles, commencées samedi après-midi, ont continué dans la soirée. Lundi matin, la police a fait savoir qu'elle recherchait six Pakistanais. Parmi les personnes arrêtées depuis l'attentat figurent des hommes relâchés récemment après avoir été détenus dans le cadre de l'enquête sur les attentats ayant coûté la vie à 34 personnes le 7 octobre 2004 dans une autre station balnéaire du Sinaï, Taba, et ses environs. Le procès de trois hommes, dont l'un est toujours en fuite, soupçonnés d'implication dans les attaques de Taba a repris dimanche à Ismaïliya, au nord-est du Caire. Entre-temps les experts légistes continuaient leur travail d'identification des corps des victimes. Selon des sources médicales, certains corps sont carbonisés et sont difficilement identifiables, avertissant que le bilan des morts pourrait s'alourdir, certains des blessés se trouvant dans un état critique. "Je n'ai jamais vu autant de personnes éventrées et de blessures affreuses de ma vie. Je ne savais plus qui secourir en premier", assure une infirmière de l'hôpital de Charm el-Cheikh. A Rome, le ministère des affaires étrangères a annoncé samedi qu'un Italien avait été tué dans ces attentats, alors que Londres a fait état de huit Britanniques blessés. Aucune victime française n'a été dénombrée dimanche matin et aucun dispositif spécial n'a été mis en place pour rapatrier les touristes français après les attentats, selon le ministère des affaires étrangères français. Les touristes italiens sont rentrés en masse de Charm el-Cheikh, ainsi que plusieurs centaines d'Allemands. Côté français, le premier vol charter français de retour de Charm el-Cheikh est arrivé dimanche matin à l'aéroport parisien de Roissy avec 219 passagers à bord. Par ailleurs, la moitié des quelque 300 touristes français qui devaient partir ce week-end à Charm el-Cheikh ont renoncé à leur voyage, selon le président du Syndicat national des agences de voyage, Georges Colson. En revanche les touristes israéliens continuent d'affluer dans le Sinaï malgré les mises en garde. Côté russe, les attentats ne semblent pas avoir dissuadé les touristes. Le premier vol samedi de Moscou à destination de Charm el-Cheikh n'a pas connu d'annulations malgré la présence d'un blessé russe parmi les victimes. "D'après nos informations, il y a actuellement là-bas de 3 000 à 4 000 touristes russes", a déclaré une porte-parole de l'union des agences de voyage russes. L'ŒUVRE D'AL-QAIDA Un groupe lié au réseau terroriste Al-Qaida, "le groupe Al-Qaida au pays du Levant et en Egypte", a revendiqué les attentats dans un communiqué publié par un site islamiste, dont l'authenticité ne peut être établie. Dans son texte, ce groupe fait référence au procès ouvert le 2 juillet en Egypte de trois islamistes accusés d'avoir participé aux attaques de Taba. Le ministre égyptien de l'intérieur, Habib al-Adly, a estimé que les auteurs des attaques de Charm el-Cheikh pourraient avoir des liens avec ceux qui avaient perpétré celles de Taba Ces attentats sont les plus meurtriers en Egypte depuis le massacre de Louxor en 1997 qui avait fait 62 morts. Ils surviennent en pleine saison estivale dans cette station très fréquentée des touristes. Le président égyptien, Hosni Moubarak, qui s'était immédiatement rendu à Charm el-Cheikh dans la matinée de samedi, a affirmé qu'il ne "cèdera pas au chantage", dans une brève allocution télévisée diffusée l'après-midi. "Cet acte criminel, lâche, qui vise à déstabiliser l'Egypte renforcera notre détermination à poursuivre la lutte contre le terrorisme et à l'éradiquer", a-t-il ajouté. SEPT ATTAQUES, DONT QUATRE AVEC DES VOITURES PIÉGÉES Selon des sources policières, sept attaques se sont produites à environ 1 heure du matin en Egypte (minuit à Paris) et des témoins ont raconté à l'AFP qu'au moins quatre d'entre elles avaient été commises avec des voitures piégées. L'attentat le plus meurtrier est celui commis à l'Hôtel Ghazala Gardens, l'un des grands établissement qui borde la plage de la station. "Une voiture piégée a forcé l'entrée de l'hôtel et s'est encastrée dans la réception. Un employé a tenté de la stopper. Puis, il y a eu une énorme explosion", a raconté un témoin de l'hôtel. La police a confirmé que cette explosion était due à une voiture piégée. La porte d'entrée vitrée de l'établissement a volé en éclats, la réception a été ravagée et la façade soufflée. Des débris de fer, de bois, des lampadaires jonchent le sol sur une centaine de mètres témoignant de la violence de l'explosion. Des sièges de la réception ont été éjectés et les commerces des galeries marchandes ont été soufflées. "Il y a au moins 25 morts, la plupart des Egyptiens employés de l'hôtel, les touristes étant logés dans des villas situées dans un parc de l'autre côté de l'entrée", a indiqué un policier. Un cordon de policiers anti-émeutes, vêtus de treillis noirs, assurent la sécurité et repoussent à une centaine de mètres de l'hôtel les curieux et employés d'hôtel qui ont afflué après avoir entendu les explosions. Une autre explosion s'est produite dans un parking avec une telle violence que plusieurs vitres de magasins situés à proximité ont volé en éclats. EXTRÊME VIOLENCE "Ils sont fous. Quel est le sens de tout cela. Aucune religion ne peut accepter cela", a dit Carol, une jeune Britannique qui travaille comme serveuse dans un autre hôtel. Des groupes de touristes téléphonent à leurs familles afin de les rassurer et de nombreux réceptionnistes d'hôtels contactés par l'AFP ont fait part d'une inquiétude grandissante parmi les vacanciers. Au souk de la vieille ville, d'autres explosions se sont produites dans la galerie marchande. Selon Achraf, propriétaire d'un restaurant russe situé à proximité, "les explosions ont été d'une extrême violence". "J'ai vu beaucoup de victimes", a-t-il dit à l'AFP. "Nous avons annulé les vacances des forces de l'ordre et déployé des unités anti-terroristes à Charm", a indiqué un haut responsable policier. L'entrée de l'hôpital principal de Charm el-Cheikh est interdite et des policiers casqués et portant des boucliers se sont déployés sur l'esplanade située devant l'établissement. Le groupe hôtelier français Accor a indiqué dans un communiqué qu'aucun de ses trois hôtels n'avait été touché. "Il y aurait un client saoudien légèrement touché alors qu'il se trouvait à l'extérieur", indique le groupe qui précise qu'un responsable se rendra sur place afin d'aider au départ des clients qui le souhaiteraient. Israël a proposé à l'Egypte son assistance pour participer aux opérations de secours, indiquant qu'au moins un Israélien avait été blessé dans les attentats. Le gouvernement japonais s'est déclaré "gravement choqué", le secrétaire général de l'ONU Kofi Annan a exprimé sa "douleur et sa colère" après les attentats que l'Autorité palestinienne a "fermement condamné". Sur France Inter, M. Philippe Douste-Blazy a estimé samedi que "l'avenir des démocraties" est en jeu face à la multiplication des attaques terroristes. Il a évoqué une "situation internationale de très grande tension" qui impose une "vigilance extrême", notamment de la part des touristes se trouvant ou voulant se rendre sur place.