Médaille d'or : Dimanche 12 février, deux Américains à peine sortis de l'adolescence, Shaun White et Daniel Kass, ont obtenu les médailles d'or et d'argent de l'épreuve masculine. Le premier, 19 ans, une tignasse d'apprenti rockeur, professionnel depuis l'âge de 13 ans et déjà plusieurs fois millionnaire en dollars, a avoué avoir pensé à sa famille avant son premier "run" : "Je me suis dit : "Mec, ils doivent flipper". Alors, j'ai tout envoyé." Le second a promis une "bringue énorme" pour fêter sa deuxième place. Le lendemain, le podium de l'épreuve féminine a pris les mêmes couleurs, celles du Star-Spangled Banner, le drapeau US. Au risque de lasser. Hannah Teter, première, Gretchen Bleiler, deuxième. Quatre ans plus tôt, aux Jeux de Salt Lake City, la moisson avait été presque identique : médaille d'or chez les filles, triplé chez les garçons. Le secret ? Selon les Français, déçus de repartir les poches vides, les "riders" américains ne jouent pas avec les mêmes cartes. "Ne cherchez pas, ils ont inventé ce sport, ils en font aujourd'hui ce qu'ils veulent, lâche Jean-Philippe Garcia, l'entraîneur de l'équipe de France. Nous, on doit passer l'hiver à aller d'une épreuve de Coupe du monde à une autre, un coup dans un bled de Finlande, la fois suivante au fin fond du Japon. Eux, ils s'entraînent chez eux, sur des "pipes" entretenus toute l'année. Et, comme la FIS (Fédération internationale de ski) leur a accordé un passe-droit, ils peuvent organiser leurs sélections, en janvier, pour amener aux Jeux les quatre meilleurs du moment." "TRÈS GROS BUSINESS" Aux Etats-Unis, une vie de "rider" se mène grand train, sans avoir jamais à gratter les fonds de tiroir pour atteindre la fin du mois. Jean-Philippe Garcia l'assure : "Les marques et la fédération mettent une fortune dans la discipline. Tous les week-ends, les gamins peuvent choisir entre des tas de compétitions. Le "snow" est dans leur culture, ils savent en faire un show et un très gros business." Doriane Vidal, huitième, bousculée par cette vague de jeunesse à l'accent américain, n'a jamais pu en faire autant, malgré sa médaille d'argent en 2002. "Nous, les Français, on a longtemps dû se débrouiller seuls", soupire-t-elle. Mathieu Crépel, le plus amer des Français, éliminé dimanche en qualifications, veut même jurer sur l'honneur que son vainqueur, Shaun White, aurait les faveurs du jury. "Les juges sont des mecs comme nous, ils lisent les magazines spécialisés, regardent la télé, voient les publicités, martèle-t-il dans la zone d'arrivée. Shaun White, il part avec au moins 5 points de plus." La loi du plus riche. Et de l'inventeur des règles.