Annonce Dix-huit pays parmi les plus démunis de la planète devraient bénéficier d'une annulation de leur dette multilatérale, soit 40 milliards de dollars. Le G8 efface des ardoises Par Armelle THORAVAL lundi 13 juin 2005 (Liberation - 06:00) Londres de notre correspondante ordon Brown a un certain talent de jongleur. Une qualité qui a permis au ministre des Finances britannique de boucler, samedi à Londres, un sommet du G8 Finances qualifié d'«historique» sur la dette des pays les plus pauvres. L'accord obtenu après des discussions très serrées, notamment entre les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, d'un côté, la France, l'Allemagne et le Japon, de l'autre, porte sur «une annulation de 100 % de la dette des pays pauvres très endettés». Ainsi, 40 milliards de dollars dus par dix-huit pays (dont quinze africains) aux grands bailleurs de fonds, la Banque mondiale (BM), le FMI et la Banque africaine de développement (BAD), doivent être effacés quasi immédiatement. Dans les dix-huit prochains mois, onze autres pays bénéficieraient, eux aussi, d'un coup d'éponge de 11 milliards. Puis, à condition d'avoir satisfait aux exigences de la BM et du FMI, les quatre derniers de la classe des 38 pays asphyxiés par le poids de leur dette... Soit, au total, 55 milliards de dollars de dettes, récompensant d'abord les bons élèves, adeptes des «ajustements» économiques. Pour obtenir une telle avancée, il fallait convaincre Washington. Au début de la semaine dernière, Tony Blair a rendu visite à George Bush pour lui arracher les grandes lignes d'un accord. Il n'était pas, apparemment, revenu de son périple avec grand-chose dans sa besace. Vendredi, à l'ouverture de la rencontre réunissant les ministres des Finances des pays riches, Londres et Washington, soutenus par Ottawa, ont mis leurs propositions sur la table pour dix-huit pays. Et Paris, entre autres, a freiné, jugeant «inacceptable» un deal ne précisant pas les modalités de financement. Fallait-il puiser dans les ressources de la Banque mondiale et de la BAD, quitte à limiter leurs moyens d'action en faveur d'autres pays ? La France a finalement obtenu le principe d'une compensation : chaque dollar de dette effacée sera financé par les pays riches. Reste la mise en oeuvre. D'abord, la proposition du G8 devra être validée en septembre, lors des réunions de la Banque mondiale et du FMI. Ensuite, les 40 milliards de dollars ne se traduisent pas par un versement de cash mais par l'engagement d'assurer le remboursement de la dette. Au final, cela revient pour les pays riches à un effort annuel d'environ 1,5 milliard de dollars. Effort qui, pour être significatif, ne doit pas conduire à puiser dans l'aide publique au développement. On est loin du «plan Marshall» porté par les Britanniques, qui souhaitaient cumuler effacement de la dette et doublement de l'aide par un mécanisme financier d'emprunt au long cours (IFF) visant à dégager 50 milliards de dollars supplémentaires par an. L'idée, même circonscrite à la santé (vaccination et paludisme), est rejetée par les Américains (et par le Japon). La France, elle, a réussi à faire entériner son idée de taxe sur les avions. Washington n'en veut pas, mais ne met pas son veto. Tous ont promis des augmentations de l'aide publique, pour se rapprocher progressivement de l'objectif de 0,7 % du PIB, réaffirmé depuis trente-cinq ans. Il reste un peu plus de trois semaines d'ici au sommet du G8, à Gleneagles en Ecosse, dont les ONG espèrent qu'il ira encore plus loin.