Manifestation Des dizaines d'arrestations à MinskLes quelques centaines d'activistes qui protestent contre le résultat du scrutin de dimanche campent toujours dans la capitale biélorusse • Malgré les menaces, ils reçoivent un soutien discret de la population •Des montagnes de sandwichs et des sacs entiers de bonbons: les jeunes démocrates biélorusses qui occupent depuis lundi la place d'Octobre, au centre de Minsk, ne sont toujours pas très nombreux, quelques centaines à peine ce mercredi matin, mais ils tiennent bon et reçoivent le soutien discret de la population. Passant auprès du camp, des babouchka s'arrêtent et déversent leurs cabas aux jeunes qui tiennent la place: «Je fais et je ferai tout ce que je peux avec mes petites forces», explique Tatiana, solide grand-mère de 60 ans, venue apporter plusieurs paquets de cigarettes et du chocolat. En uniformes et en civil tout autour du camp, des miliciens inspectent les sacs des passants et ont déjà arrêté plusieurs jeunes, coupables d'avoir eu un peu trop de nourriture ou des thermos dans leurs sacs. Mais discrètement, la population n'en continue pas moins à braver toutes les intimidations. «Avoir peur serait renoncer à ma dignité», explique Tatiana devant un milicien venu écouter la conversation.Au troisième jour, la vie s'est installée dans le petit camp qui compte maintenant une trentaine de tentes, une sono assez puissante et même des toilettes. «Ce qui nous manque le plus, c'est l'eau chaude pour se réchauffer avec du thé ou du café», confient Alies et Andrei, deux étudiants venus de Grodno, qui après deux jours et deux nuits avouent qu'ils sont gelés et épuisés. «On a très mal aux jambes et on n'arrive pratiquement pas à dormir dans ces petites tentes. Mais nous resterons jusqu'au bout!» promettent ces étudiants qui n'ont de toutes facons plus guère d'autre choix: Andrei, étudiant en médecine, a été prévenu qu'il serait exclu de l'université si jamais il montait à Minsk et ratait les cours cette semaine. «Mais je ne pouvais pas ne pas venir», insiste-t-il. «Si j'étais resté sans rien faire, je me serais senti trop coupable.»Tous les activistes qui tiennent la place d'Octobre savent qu'ils risquent gros. «On m'a déjà annoncé que je ne toucherai plus ma retraite d'invalide de l'armée soviétique», explique le Père Viktor Kovalkov, prêtre de l'église autocéphale biélorusse, non reconnue par les autorités, venu bénir les tentes et les orner d'icônes. «Moi, ils m'ont menacé de me retirer mon appartement», raconte Oksana Filipenko, 36 ans, venue de Gomel en voiture, puis en train après que la voiture avec laquelle elle voulait monter à Minsk ait été saisie par la milice sur la route. Dans la nuit de mardi à mercredi, discrètement, des dizaines d'activistes ont encore été arrêtés et au moins un militant a été roué de coups après avoir quitté la place. Harcelés, épuisés et peu nombreux, les démocrates de la Place d'Octobre n'en veulent pas moins tenir jusqu'à la grande manifestation prévue samedi 25, en espérant que d'ici là, le peuple biélorusse se réveille.
