Annonce Des associations accusent le plan Villepin de faire des étrangers "des boucs émissaires" Le plan de lutte contre l'immigration irrégulière présenté, mercredi 11 mai, par Dominique de Villepin (Le Monde du 12 mai) a suscité nombre de réactions indignées à gauche et parmi les associations de défense des droits de l'homme. Jean-Marie Bockel, sénateur-maire (PS) de Mulhouse et président de l'Association des maires des grandes villes de France (AMGV), s'est distingué dans ce concert de critiques en déclarant qu'"on ne peut qu'approuver" les différentes mesures annoncées par le ministère de l'intérieur. "L'immigration illégale reste une réalité en France, on peut donc se féliciter qu'enfin il y ait au niveau du gouvernement une volonté d'accélérer la mise sur pied d'un plan d'actions contre l'immigration clandestine" , a-t-il précisé. Un autre responsable socialiste, l'ancien ministre de l'intérieur Daniel Vaillant, a adopté une position plus nuancée, affirmant que "la lutte contre l'immigration clandestine, et notamment les filières qui exploitent des femmes et des hommes, paraît une thématique juste" . "Mais, les moyens ne paraissent pas formatés à l'aune des problèmes. Ce n'est pas avec une police de l'immigration française que l'on va régler le problème" , a-t-il déclaré. Du côté du Groupe d'information et de soutien des immigrés (Gisti), de la Ligue des droits de l'homme (LDH) ou de France Terre d'asile (FTDA), on estime que les nouvelles mesures "ne résoudront rien" et ne font qu'"officialiser la chasse dont sont actuellement victimes les étrangers" . La LDH s'alarme de l'"atteinte portée directement à des libertés aussi essentielles que celle de se marier" . Elle s'inquiète aussi de la création d'un fichier national des attestations d'accueil qui, selon elle, risque d'entraîner "un fichage sans cesse accru des Français comme des étrangers" . Ces craintes sont partagées par Claire Rodier, membre du Gisti. Celle-ci a cependant une "impression de déjà vu" : "La rhétorique des ministres de l'intérieur est la même depuis vingt ans. Tous cherchent à marquer de leur fer la politique de l'immigration. Cette fois-ci encore, le ministre donne le sentiment de faire de la surenchère par rapport à son prédécesseur. Mais le fond du discours est en fait très convenu, fondé sur la fermeture des frontières. On est bien dans la continuité d'un système de répression avec des effets d'annonce qui font froid dans le dos." "HONTEUSES ET SCANDALEUSES" "EN AGISSANT AINSI, LE GOUVERNEMENT FAIT DE TOUS LES ÉTRANGERS DES BOUCS ÉMISSAIRES AU RISQUE D'ALIMENTER LA XÉNOPHOBIE, insiste la LDH dans un communiqué. En laissant croire que le recours à la police vaut politique d'immigration, le gouvernement, au-delà du mensonge, pratique la politique de l'autruche." Pierre Henry, directeur général de FTDA, partage cette analyse. "Sous un discours aux accents très durs, M. de Villepin parle d'atteindre 20 000 expulsions en 2005, dit-il. Dans le même temps, il estime entre 200 000 et 400 000 les personnes en situation irrégulière tout en écartant une quelconque régularisation de ces personnes. Il acte ainsi que plusieurs milliers de personnes vont rester dans la précarité, l'insécurité et l'incertitude." M. Henry craint que le discours du ministre entraîne une "radicalisation" et la multiplication des "actions désespérées" , comme celle des douze grévistes de la faim qui, au terme de cinquante jours de jeûne, ont fini par obtenir l'assurance de leur régularisation, le 6 mai. C'est pour, dit-il, éviter ce type d'impasse que FTDA a lancé, en mars, une pétition demandant le réexamen de la situation des déboutés du droit d'asile. Les partis de l'opposition sont également très critiques. "Notre pays est en train de présenter l'immigré comme la figure de l'étranger qu'il faut soupçonner en permanence. Le gouvernement n'a rien compris au flux d'immigration et à ce que doit être une immigration bien contrôlée aujourd'hui" , dénonce le député (Verts) Noël Mamère, qui a qualifié les nouvelles mesures de "honteuses" et "scandaleuses" . Malek Boutih déplore que le gouvernement soit "tétanisé à l'idée de reconnaître les besoins de notre pays en matière d'immigration" . "Il est temps, insiste le secrétaire national du PS chargé des questions de société, que la France propose, en matière d'immigration, une nouvelle politique qui accepte officiellement l'entrée d'immigrés avec de vrais dispositifs d'accueil et d'insertion." Pour la présidente du groupe communiste au Sénat, Nicole Borvo, le plan du ministre n'est que la traduction de la "volonté de créer un Europe forteresse" portée par la Constitution européenne.