Accuser Des anciens otages américains accusent le nouveau président iranien d'être un terroriste Washington soupçonne Ahmadinejad d'avoir trempé dans la prise d'otages de 1979 Le dossier iranien se complique encore un peu plus pour les Etats-Unis, déjà peu rassurés par le succès des antiréformateurs à la dernière élection présidentielle. Le nouveau chef de l'Etat a été identifié, à la télévision et dans les journaux, par cinq des cinquante-deux anciens otages de l'ambassade américaine à Téhéran comme étant l'un de leurs ravisseurs. Au moins un des ex-captifs, Thomas E. Shaefer, colonel d'aviation en retraite, affirme pour sa part n'avoir pas reconnu Mahmoud Ahmadinejad comme l'un des preneurs d'otages. Vingt-cinq ans après une captivité qui commença le 4 novembre 1979 et se poursuivit pendant 444 jours, les accusateurs assurent que leur mémoire est infaillible. «Dès que j'ai vu sa photo dans le journal, j'ai su que c'était bien ce salaud», a déclaré au Washington Times Charles Scott, colonel de l'armée en retraite, aujourd'hui âgé de 73 ans. Et de prononcer le mot qui gêne, mais que le journal conservateur de la capitale s'est fait un plaisir de reproduire, à la satisfaction des opposants à tout rapprochement avec Téhéran : «Le nouveau président de l'Iran est un terroriste.» Daugherty est même allé plus loin dans ses propos rapportés : «Cela met l'Administration Bush dans une position intéressante. Vous savez que Bush avait dit : vous êtes avec nous ou vous êtes avec les terroristes. Eh bien, maintenant, le chef de l'Iran est un terroriste.» Sous-entendu : depuis quand négocie-t-on avec les terroristes ? La Maison-Blanche prend l'affaire très au sérieux. «Je n'ai pas d'information pour confirmer ou démentir les accusations des ex-otages, a souligné George W. Bush, mais l'implication (de Mahmoud Ahmadinejad) soulève de toute évidence de nombreuses questions et quand on sait combien les gens veulent trouver les réponses, je suis sûr que l'on saura.» «Nous enquêtons pour en savoir davantage», avait déclaré plus tôt le porte-parole de la Maison-Blanche, McClellan, tout en réfutant qu'il s'agisse d'une enquête en bonne et due forme : «Je ne la décrirais pas de cette façon. Je dirais que nous examinons les faits.» Pour l'instant, les faits sont essentiellement les dires des anciens otages. Ni Associated Press ni le Washington Times n'ont pu identifier le jeune Ahmadinejad au côté d'un otage les yeux bandés sur une photo de l'agence datant de novembre 1979 et diffusée à Londres par Iran Focus, un service de presse hostile au régime des mollahs. En revanche, l'ancien otage Chuck Scott a fourni des détails précis sur un incident impliquant Ahmadinejad : celui-ci, en charge de la sécurité, aurait vertement critiqué les autorisations de sortie des prisonniers pour leur marche quotidienne : «Ces types sont des chiens, des porcs, des animaux. Ils ne méritent pas de sortir de leur cellule.» Les accusateurs vont devoir non seulement étayer leurs souvenirs par des preuves mais balayer les soupçons et les arrière-pensées. Celles-ci peuvent être d'ordre personnel : William Daugherty voit dans l'affaire une occasion de rappeler que le Département d'Etat ne devrait pas s'opposer aux procès pour dommages et intérêts qu'ont intentés les anciens otages à l'Iran. En avril 2002, un juge fédéral les a déboutés d'une demande d'indemnisation de 33 milliards de dollars parce que les poursuites auraient violé les accords négociés par l'Administration Reagan pour la libération du personnel de l'ambassade. Les accusations actuelles peuvent aussi paraître politiquement motivées. Kevin Hermening, un ancien marine et gardien de l'ambassade, a affirmé avoir subi une interrogation musclée face à celui qui est devenu président de l'Iran : «Il n'y a absolument aucune raison pour que les Etats-Unis normalisent leurs relations avec un homme qui semble déterminer à faire avaler au monde le terrorisme d'Etat.»