Anniversaire COMMÉMORATION Cent ans après la séparation des Églises et de l'Etat, la France, confrontée à la progression du culte musulman, rouvre le débat Laïcité : les nouveaux enjeux de la loi de 1905 Les cérémonies officielles dédiées à la célébration du centenaire de la loi de 1905, dite de séparation entre les Églises et l'Etat, s'ouvrent cet après-midi sous la coupole de l'Académie française. En présence de Jean-Pierre Raffarin, qui a confié à l'Institut des sciences morales et politiques la commémoration de cet anniversaire, plusieurs académiciens, à la suite de Jean Tulard, tenteront de définir le cadre historique dans lequel ont été posés les fondements de la laïcité française. Au terme de quatre autres grands rendez-vous, qui seront consultables sur le site 1905-2005.fr, l'Académie a invité le président de la République à conclure, en fin d'année, la commémoration de la loi votée le 9 décembre 1905. La coupole de l'Académie française servira de cadre cet après-midi à l'ouverture des cérémonies officielles de commémoration de la loi de 1905.  (Photo Le Figaro)  Les références judéo-chrétiennes de l'Europe, gommées de la Constitution de l'Union qui doit être bientôt soumise à référendum ; le débat sur l'entrée de la Turquie dans cette même communauté européenne ; la vision qu'ont de la loi de 1905 les différentes églises et loges maçonniques, chacune fourbissant sa propre commémoration ; ou encore, l'hypothèse plus radicale, soulevée notamment par Nicolas Sarkozy, d'une révision de la loi de 1905, afin de financer plus vite, et sur fonds publics, l'islam de France : nul doute que la commémoration s'animera bientôt, et ravivera de vieilles querelles. De tous les débats à venir, celui concernant la place de l'islam dans la République est le plus prévisible. A cet égard, l'exemple fourni par le département de la Réunion ne manque pas d'intérêt. Sur cette île multiethnique de quelque 700 000 habitants, ont prospéré les mosquées et les medersa (écoles coraniques). Toutes ont été financées sur les fonds privés de la communauté indo-musulmane originaire du Bujrat, dans le nord-ouest de l'Inde. L'«exemple réunionnais» frappe tout voyageur. Ainsi le ministre Jean-Louis Borloo qui, à peine débarqué, a récemment lancé l'idée de réunir «un Davos de l'intégration» sur cette île ayant précédemment servi de modèle à Jean-Pierre Chevènement dans la définition d'un «islam de France». Membre de cette consultation, Osman Molla s'enorgueillit d'avoir proposé d'élire les représentants de l'islam de France en fonction du nombre de mètres carrés des mosquées. Mais lassé par les bisbilles entre Marocains, Algériens et fondamentalistes du Conseil français du culte musulman, ce chef d'entreprise a fini par jeter l'éponge, non sans avoir noté qu'«en métropole, au niveau de l'argent, il y a beaucoup de pertes, pour ne pas dire plus». A la Réunion, les gestionnaires du culte musulman veillent scrupuleusement sur leurs bilans financiers. Abdoullah Mollan, qui préside le conseil d'administration de la grande mosquée de Saint-Denis, salarie 32 imams, qui officient et enseignent dans différentes écoles coraniques de la ville. «Mais mon association, précise Abdoullah Mollan, ne gère que la partie cultuelle.» Ce sont d'autres structures, fort nombreuses sur l'île, qui ont investi le champ culturel et social. La communauté musulmane de la Réunion, structurée par des immigrants indiens sans passé colonial avec la France, devenus des commerçants aisés capables de financer leur culte, ne peut certes être comparée avec les communautés musulmanes de métropole. «Ici tout fonctionne bien», reconnaît Farouk Omarjee, le président du conseil régional du culte musulman et gestionnaire de la belle mosquée de Saint-Pierre. «Nous avons la chance de vivre dans un pays de tolérance. Mais, ajoute-t-il, c'est un équilibre très fragile et très subtil qu'il nous faut conserver.»