Concert Coldplay à L'olympia -Le phénomène Coldplay dans l'intimité de l'OlympiaLe plus en plus souvent, les maisons de disques fêtent les sorties d'albums de leurs vedettes en organisant un concert dans une salle de capacité inversement proportionnelle à la popularité des artistes.Quelques mois avant les tournées mammouths, le privilège des happy few et les frustrations de ceux qui n'ont pas de billets servent de caisse de résonance à l'événement. En octobre (la date reste à déterminer), Coldplay remplira sans peine Bercy, mais le jeudi 9 juin, trois jours après la sortie de X & Y, son troisième opus, le groupe britannique s'offrait, à Paris, l'intimisme de l'Olympia.En ces temps de crise, un groupe ayant écoulé près de 20 millions de disques en deux albums est attendu comme le Messie. Speed of Sound, premier single tiré de l'album, s'est installé dès sa sortie dans les dix meilleures ventes de disques aux Etats-Unis, une première depuis les Beatles pour un groupe britannique.A chaque nouvel album, on sent le répertoire de ces Londoniens évoluer comme si le succès augmentait les responsabilités et la nécessité de répondre à la foule des fans. Parachutes, leur coup d'essai, avait l'écho boisé de refrains composés dans des chambres d'étudiants. Guitare sèche et piano savaient jouer de l'évanescence. Le lyrisme mélancolique du chanteur Chris Martin paraissait se confier.Le triomphe de ces premières chansons attirera le groupe vers une conscience de sa nouvelle ampleur, reflétée dans l'allant plus électrique de Rush of Blood to the Head, deuxième épisode de ses aventures. Batterie et riffs plus conquérants, ferveur plus épique de la voix, tension plus sombre des ambiances, ont fait de ce disque un des chocs de 2002.MODULATIONS D'ARCHANGELe statut acquis par Coldplay l'entraîne désormais à s'équiper pour jouer dans les stades. Les chansons de X & Y vibrent souvent de six-cordes tentées par le grandiose, de synthétiseurs planant à mille pieds au-dessus du piano, d'un chant nourri de réverbération cosmique. On pourrait sombrer dans le rock pompier, mais la sensibilité mélodique de Chris Martin, ses modulations d'archange, flirtent plus souvent avec le ravissement qu'avec la lourdeur.Sur scène, cette dynamique en expansion les rapproche de U2. Le guitariste Johnny Buckland fait miroiter des arpèges homériques à la façon de The Edge, le bassiste Guy Berryman et le batteur Will Champion gonflent les rythmes comme aiment le faire les Irlandais. Dommage que leur charisme ne soit pas à la hauteur de ces intentions.La dimension humaine de l'Olympia permet au quatuor vêtu de noir de chaleureusement communier avec son public (dont 500 fans venus d'Angleterre et 200 journalistes internationaux), alternant envolées (Square One, Politik) et ballades frémissantes (Don't Panic, Yellow, The Scientist). A un moment, le groupe délaisse la batterie et se cale à gauche de la scène pour une parenthèse folk avec harmonica. Mais si Chris Martin se donne du mal pour occuper les planches en virevoltant autour de son piano, jamais avare de sourires et de gages d'intensité, les concerts continuent de révéler les limites de Coldplay.Habile et touchant en studio, le groupe s'applique trop en concert pour générer de l'urgence. Gendre idéal, fiancé fantasmé, grand frère capable de convaincre de l'utilité de s'engager pour Greenpeace, Amnesty International ou en faveur du commerce équitable, le chanteur, compagnon de l'actrice Gwyneth Paltrow, ne flirte sans doute pas suffisamment avec les gouffres pour donner de vrais vertiges.Croisé le matin même dans l'hôtel de la rue de la Paix où séjournait son copain Chris Martin, Noel Gallagher, coleader d'Oasis, confiait : "Chris m'a appelé l'autre jour. Il vivait mal l'emballement général autour de Coldplay et me demandait : 'Toi qui as déjà vécu ça, donne-moi des conseils !' Je lui dis : 'Mec, moi j'ai géré ça avec des drogues et de l'alcool. Toi, tu ne bois pas et tu ne te drogues pas. Que veux-tu que je te dise ?'"
