Crise Climat insurrectionnel à BeyrouthLes manifestations organisées jeudi au Liban pour protester contre la crise économique et la politique fiscale du gouvernement ont dégénéré. Bilan : trois morts à Beyrouth, au moins dix-sept blessés, un ministère incendié. Des barrages de parpaings dans les rues, des affrontements entre militaires et manifestants, des véhicules blindés déployés dans les rues : jeudi, c'est toute la banlieue sud chiite de Beyrouth qui s'est enflammée. L'armée libanaise a ouvert le feu sur des manifestants, tuant trois d'entre eux. Dix-sept personnes ont été blessées. Une télévision privée libanaise a montré des images de manifestants à terre, roués de coups par les forces de l'ordre, derrière un barrage de l'armée. Ailleurs à Beyrouth, quelque 2.000 personnes se sont rassemblées devant le siège du gouvernement, portant des banderoles dénonçant la corruption du gouvernement. Dans la soirée, des groupes de jeunes ont pénétré de force dans les locaux du ministère du Travail à Chiyah et y ont mis le feu. Le président libanais Emile Lahoud a demandé jeudi soir l'ouverture d'une enquête sur ces violences.Une bonne partie du reste du pays était au même moment bloquée par une grève générale lancée par la Confédération générale des travailleurs (CGTL). Quelque 40 syndicats avaient répondu à l'appel, paralysant les secteurs de l'enseignement public et privé et des transports. L'Association des industriels libanais avait également proclamé un arrêt des activités commerciales dans le pays, sans stopper la production. En milieu d'après-midi, la CGTL a appelé à "l'arrêt des manifestations pour sauvegarder le caractère pacifique du mouvement revendicatif" ; mais les violences ont continué.Retour précipité à Beyrouth de Rafic HaririLa crise que traverse le Liban a ainsi fait ses premières victimes civiles jeudi, avec en toile de fond des conditions de vie de plus en plus difficiles pour une grande partie de la population. La CGTL réclame une baisse du prix de l'essence de 17 à 10 dollars les 20 litres et dénonce la politique fiscale du gouvernement. Au Liban, où l'essence est taxée à 50%, le prix de l'essence et des autres carburants ont presque doublé depuis un an, affectant de nombreux secteurs de l'économie. L'économie libanaise est plombée par une dette publique de 34 milliards de dollars et la hausse des prix du carburant, amplifiée par la forte hausse du baril sur les marchés mondiaux, aggravent la crise. Les industriels dénoncent depuis longtemps les coûts de production élevés qui rendent leurs produits peu compétitifs ; la grogne des chauffeurs de taxis collectifs a été le détonateur de la grève générale de ce jeudi.Ces troubles surviennent en outre dans un contexte politique caractérisé par l'affaiblissement du Premier ministre Rafic Hariri, après ses revers aux récentes élections municipales à Beyrouth et dans sa ville natale de Saïda. Celui-ci, qui se trouvait à Damas jeudi, a écourté son séjour pour regagner Beyrouth après un long entretien avec le président Bachar al-Assad. En 1992, une manifestation contre la vie chère, marquée par l'incendie de centaines de pneus à Beyrouth et autour de la capitale, avait mené à la chute du Premier ministre, alors Omar Karamé, qui avait été remplacé par Rafic Hariri.
