Décision Catastrophe naturelle : La décision de Médecins sans frontières (MSF) de suspendre son appel à la générosité a suscité des réactions agacées d'autres ONG La décision de MSF de suspendre ses collectes de dons a provoqué une série de réactions contradictoires dans le monde des ONG.  La décision de Médecins sans frontières (MSF) de suspendre lundi sa collecte de dons à destination de l'Asie a suscité étonnement et agacement dans de nombreuses organisations non gouvernementales (ONG). Certaines jugent son message totalement «incompréhensible». Toutes craignent des répercussions sur leurs propres appels aux dons, même si elles ne souhaitent pas créer de polémique inutile en pleine période de générosité. «Ce genre de message peut brouiller la perception de l'urgence», estime-t-on à Handicap international. A la Fondation de France, on a peur de l'amalgame : «Beaucoup de donateurs nous ont demandé aujourd'hui si on avait encore besoin d'argent. Certains confondent MSF et FDF. Un homme affolé nous a ainsi téléphoné car il avait compris – à tort – que la FDF ne voulait plus de dons», explique une responsable. La décision de Médecins sans frontières pourrait laisser penser que les autres ONG ne réclament plus de dons pour financer leurs opérations. «Ce n'est pas le cas. MSF sont des urgenciers qui travaillent sur le court terme, nous travaillons en revanche sur le long terme, la reconstruction», explique-t-on à la Fondation de France. Le fait de dire publiquement, à la télévision, que Médecins sans frontières suspendait sa collecte de dons pour l'Asie, s'apparente selon Franck Hourdeau, responsable d'Action contre la faim, à une «erreur de communication» : «Les personnes présentes auraient dû dire clairement qu'il fallait continuer à donner à une autre association. Nous n'avons pas les mêmes objectifs. Dans quatre ans, nous serons encore en Indonésie, MSF en sera parti dans trois mois.» Sur le fond, la plupart des ONG contactées comprennent cependant cette décision inhabituelle. «Si une ONG considère qu'elle ne sera pas en mesure d'utiliser les surplus de dons, c'est éthique et courageux.», estime ainsi la présidente de Médecins du monde, Françoise Jeanson. Le directeur général de MSF, Pierre Salignon, reconnaît cependant que cette décision, prise lundi de façon collégiale par la direction internationale de l'ONG, demande des explications. L'arrêt des dons à l'Asie du Sud n'a été indiquée lundi que sur le site Internet de MSF et aux seuls donateurs qui lui téléphonaient. «C'est la première fois que nous sommes amenés à prendre ce genre de décision. Il ne s'agit pas de briser l'élan de solidarité, mais c'est une question d'honnêteté». Dix jours après la catastrophe, l'association, dans le monde, a déjà collecté plus de 40 millions d'euros de fonds affectés à cette crise, dont 5 millions pour la seule section française. En comparaison, l'an dernier à la même époque, pour le tremblement de terre à Bam, en Iran, MSF avait recueilli 600 000 euros en 15 jours en France. «C'est une somme considérable, exceptionnelle, explique Pierre Salignon. Vu l'ampleur de la catastrophe, nous pouvons être amenés à sortir de notre rôle strictement médical. Mais nous ne pouvons pas nous improviser spécialistes de la reconstruction. Cela relève davantage de l'aide bilatérale d'Etat à Etat.» Pierre Salignon se bat par ailleurs contre le «stéréotype» qui veut que les secours extérieurs d'urgence sont les plus efficaces : «C'est faux. Au Sri Lanka, par exemple, la mobilisation des autorités et des ONG locales est considérable. Il faut aussi savoir attendre les demandes spécifiques de ces Etats. Nous ne voulons pas continuer à solliciter le public pour des opérations qui sont déjà financées. D'autant plus que les dons affectés à l'Asie ne peuvent servir à d'autres causes.» En revanche, l'ONG a toujours besoin du soutien pour ses autres programmes. Elle continue à travailler auprès des malades victimes du sida et de la tuberculose, et auprès des populations victimes de conflits «oubliés» et «moins médiatisés» comme celui qui du Congo ou du Darfour. Certaines ONG profitent naturellement de cet élan de solidarité sans précédent pour augmenter leurs fichiers de donateurs à peu de frais, observe par ailleurs le responsable d'une association qui dénonce le manque de clarté de certains sites internet. Lorsqu'on clique sur le bandeau «Urgence Asie» du site internet d'Action contre la Faim (ACF), il apparaît que les dons effectués en ligne seront affectés «en fonction des urgences (...) et des besoins qui leur correspondent». Cela permet à ACF de «d'affecter les dons à d'autres actions humanitaires qui n'ont rien à voir avec l'Asie», s'émeut le responsable d'une association. A ACF, on répond que «beaucoup de donateurs ne spécifient pas la cause pour laquelle ils donnent. Toutes ces sommes sont affectées à l'Asie. Nos comptes sont contrôlés et publiés tous les ans. Il n'y a aucun problème».