Attentat Au sud d'Israël, des kamikazes se sont fait exploser dans des bus, faisant au moins quinze tués et quatre-vingts blessés Double attentat meurtrier à Beersheva Jérusalem : Marc Henry L'angoisse du kamikaze qui sème la mort est réapparue hier en Israël. Deux «bombes vivantes» se sont fait exploser dans deux autobus au centre de la ville de Beersheva au sud d'Israël. Le bilan des victimes est très lourd : au moins 15 morts et quelque 80 blessés. Ce double attentat, le plus sanglant depuis octobre 2003, revendiqué par des islamistes du Hamas, a brutalement mis fin à un fragile sentiment de sécurité qui prévalait dans la population israélienne ces derniers mois. Yaakov Cohen, le chauffeur d'un des autobus visés, n'en revient pas d'être encore en vie et d'avoir par instinct sauvé plusieurs de ses passagers. «Je conduisais tranquillement lorsqu'une énorme explosion s'est produite dans un autobus qui me précédait, je l'ai doublé pour m'éloigner de quelques dizaines de mètres, je me suis ensuite arrêté et j'ai ouvert les portes de mon véhicule, une douzaine de personnes se sont précipitées dehors, c'est à ce moment qu'une deuxième explosion a eu lieu dans la partie arrière de mon autobus et que j'ai vu dans le couloir des corps déchiquetés de ceux qui n'avaient pas eu le temps de fuir», a raconté ce chauffeur d'une quarantaine d'années légèrement blessé au visage par des éclats de verre. Cet attentat suicide a surpris par son ampleur. Depuis près de six mois, les services de sécurité israéliens semblaient être parvenus à trouver la parade antikamikaze grâce notamment à la construction de la clôture électronique de 700 km de long qu'Israël érige actuellement. Cette barrière a fait ses preuves dans les secteurs où elle existe déjà dans le nord de la Cisjordanie. Le nombre d'attentats près de Tel-Aviv a ainsi chuté. En revanche, dans la partie sud de la Cisjordanie, près de Beersheva, les travaux n'ont pas encore commencé.«La conclusion est évidente : là où la clôture de sécurité existe, il n'y plus de terrorisme, c'est pourquoi il faut accélérer sa construction», a affirmé Tsahi Hanegbi, le ministre de la Sécurité intérieure. Tous les porte-parole officiels ont reçu comme consigne d'expliquer dans le monde combien cette barrière «antiterroriste» est vitale pour la sécurité d'Israël. Objectif : répondre ainsi à la condamnation par la communauté internationale et la Cour internationale de justice de La Haye du tracé de l'ouvrage qui empiète sur la Cisjordanie et lèse ainsi des dizaines de milliers de Palestiniens. La traque sans pitié menée par le Shin Beth, le service de sécurité intérieure et l'armée contre les islamistes et les groupes armés liés au Fatah de Yasser Arafat a également contribué à l'accalmie de ces derniers mois. Israël a décapité la direction du Hamas responsable de la plupart des attentats suicides avec l'élimination en mars et avril du cheikh Ahmed Yassine, le fondateur du principal mouvement islamique palestinien puis de son successeur Abdelaziz Rantissi lors de raids aériens «ciblés». Dans un communiqué, le Hamas a expliqué que les attentats de Beersheva visaient à venger ces deux «martyrs» et exprimé la solidarité avec les détenus palestiniens qui observent une grève de la faim depuis la mi-août. L'Autorité palestinienne de Yasser Arafat a en revanche condamné «le meurtre de civils». Sur le front politique, Ariel Sharon a proclamé que «la lutte contre le terrorisme va continuer de plus belle» et convoqué dans la soirée le cabinet de sécurité pour décider d'opérations militaires. Hasard du calendrier : peu avant les attentats de Beersheva, le premier ministre avait annoncé au groupe parlementaire du Likoud, son parti, qu'il comptait accélérer l'application de son plan d'évacuation de la bande de Gaza et des 8 000 colons israéliens qui résident dans cette région. Cette opération est désormais prévue pour février-mars de l'an prochain et non plus en septembre 2005 comme prévu initialement.«Les attentats de Beersheva ne peuvent que renforcer la détermination d'Ariel Sharon à appliquer son plan qui constitue un motif d'espoir dans notre guerre contre le terrorisme», souligne un proche du premier ministre. Parmi les «durs» du Likoud, les colons et l'extrême droite en revanche le ton est monté d'un cran. «Le plan de séparation d'Ariel Sharon nous a explosé à la figure», a proclamé Zevoulon Orlev, un ministre du Parti national religieux. Plus véhément encore, Tvi Handel, un député d'une formation ultranationaliste d'opposition n'a pas hésité à accuser Ariel Sharon d'être «dans une certaine mesure responsable du bain de sang». «En voulant expulser de force des colons de leur foyer dans la bande de Gaza, il ne fait qu'encourager les terroristes à tuer des juifs», a affirmé ce parlementaire. Des réactions qui illustrent les tensions qui vont s'exacerber dans les prochains mois à l'approche du retrait...
