Annonce Argentine: les restes d'une disparue identifiés La religieuse française Léonie Duquet avait été enlevée et tuée en 1977 sous la dictature. Assassinée et non pas disparue. Une équipe de médecins légistes argentins a confirmé que le corps déterré au mois de juillet dans un cimetière du sud de la province de Buenos Aires est bien celui de la religieuse française Léonie Duquet, enlevée à la sortie d'une église le 10 décembre 1977. Son cadavre avait été découvert dix jours plus tard sur une plage de l'Atlantique Sud et enterré à la sauvette. Vingt-huit ans après, les légistes ont même assuré que «les fractures des os longs de Léonie Duquet sont compatibles avec les blessures causées par la chute d'un corps depuis une certaine hauteur et son impact avec un élément solide». Une information qui corrobore, une fois de plus, l'existence des «vols de la mort», ces «transferts» en avion ou en hélicoptère, d'où étaient jetés dans l'Atlantique les opposants à la dictature argentine (1976-1983). Arrêts domiciliaires. Tortionnaire, assassin mais aussi marin, Alfredo Astiz aurait dû savoir que la mer rendait les corps. Surnommé «l'Ange blond de la mort», il a été condamné par contumace en France à la réclusion criminelle a perpétuité, en 1990, pour l'assassinat des deux religieuses françaises Alice Domon et Léonie Duquet. Malgré plusieurs demandes d'extradition, l'ex-capitaine de corvette attend toujours son jugement en Argentine, aux arrêts domiciliaires dans une base navale au nord de Buenos Aires. Se faisant passer pour le frère d'un disparu, le militaire avait infiltré un groupe de défenseurs des droits de l'homme qui se réunissait dans une église. Les deux religieuses ont été détenues et torturées dans les locaux de l'Ecole mécanique de la marine (Esma), centre clandestin de détention en plein centre de Buenos Aires où auraient été tués 5 000 des 30 000 «disparus» de la dictature. Musée. «Les transferts pour les vols de la mort avaient lieu le mardi à l'aube, une vingtaine de détenus, sous sédatifs, avec des capuches sur la tête, identifiés par des numéros et surveillés par des cadets de l'école navale, des jeunes, insouciants. Ils soutenaient que si les subversifs étaient balancés à la mer vivants et qu'ils ne s'en tiraient pas c'est parce que Dieu ne l'avait pas voulu», témoigne Enrique Mario Fukman, ex-détenu, survivant. L'Esma a été fermée en mars 2004 et devrait être transformée en musée de la mémoire. Dans les sous-sols, «les ateliers de la torture», Enrique peine à trouver ses repères. Tout a changé. Pour éviter que les lieux soient reconnus par les détenus en cas d'enquête postérieure, les militaires faisaient régulièrement effectuer des travaux, condamner des fenêtres, percer des portes, déplacer des escaliers... «Si on nous avait ramenés dans ces locaux en cas de reconstitution, notre parole aurait été facilement mise en doute», s'indigne Enrique. Depuis son arrivée au pouvoir en mai 2003, le président Nestor Kirchner mène un combat sans merci contre l'impunité des militaires responsables des violations des droits de l'homme. Et finalement, en juin, la Cour suprême a déclaré inconstitutionnelles les «lois de pardon» et a rouvert la possibilité de jugement pour les tortionnaires des heures les plus noires du pays.