Mise en service Allemagne : le péage "poids lourds" est entré en serviceAprès tant d'échecs, Toll Collect ne pouvait avoir que le triomphe modeste. Et c'est bien l'attitude qu'a adoptée le consortium germano-français, dont le système sophistiqué de péage autoroutier pour poids lourds est finalement entré en service, le 1er janvier, sur les autoroutes allemandes. De façon satisfaisante, mais avec seize mois de retard qui ont provoqué de fortes tensions politiques et mis à rude épreuve la réputation du savoir-faire allemand dans les techniques de pointe.Formé de Deutsche Telekom, de DaimlerChrysler et du français Cofiroute, le consortium Toll Collect était chargé de mettre au point un système de péage autoroutier entièrement automatisé. Un boîtier électronique embarqué calculerait, à l'aide d'un système de repérage et de guidage par satellite, la distance parcourue par le poids lourd et débiterait automatiquement la facture. Le procédé devait entrer en service le 31 août 2003, et l'Etat avait déjà affecté les prévisions de recettes au développement de ses infrastructures de transports.Mais au jour dit, rien n'était prêt, Toll Collect n'étant pas parvenu à mettre au point le logiciel informatique qui devait piloter le système. Reports multiples, démission et remplacement du patron de Toll Collect, commissions parlementaires, polémiques politiciennes, menaces de faire appel à d'autres prestataires et de poursuivre pour rupture de contrat : durant des mois, l'affaire et ses rebondissements ont fait les titres des journaux. Aujourd'hui encore, l'Etat demande à Toll Collect un dédommagement de 4,58 milliards d'euros pour le manque à gagner.Après une rencontre entre le chancelier Gerhard Schröder et les patrons de DaimlerChrysler et de Deutsche Telekom, le consortium s'est réorganisé, a appelé à la rescousse Siemens et sa compétence en matière d'informatique et de téléphonie et, enfin, a rattrapé une partie de son retard. Ce redressement, espère-t-on dans les milieux industriels allemands, devrait faire oublier les péripéties précédentes et ne pas mettre en danger l'exportation d'un système présenté comme le plus performant de tous les systèmes de contrôle et de péage sur autoroute.5 000 BORNESRompant avec une longue tradition d'autoroutes gratuites, le péage allemand s'applique désormais à tout poids lourd supérieur à 12 tonnes. Le coût - 12,4 centimes par kilomètre en moyenne - dépend du nombre d'essieux du véhicule, de son niveau de pollution et de la distance parcourue. Pour les quelque 800 kilomètres qui séparent Hambourg de Munich, il en coûtera environ 100 euros. Le ministère des transports estime à quelque 1,4 million de camions, dont un tiers d'étrangers, le parc des véhicules concernés par le nouveau péage. Durant la première année, le prélèvement devrait rapporter à l'Etat près de 3 milliards d'euros.Mises à la disposition des conducteurs qui n'ont pas voulu acheter le boîtier de contrôle embarqué, quelque 5 000 bornes électroniques de péage, programmées dans les six principales langues des camionneurs qui empruntent les autoroutes allemandes, ont été installées sur l'ensemble du réseau. Il est également possible de payer par Internet. Cinq cents contrôleurs supplémentaires ont été mobilisés pour vérifier qu'aucun véhicule n'échappe au péage. Pour bien enfoncer le clou, le ministère des transports a largement diffusé, lundi 3 janvier, le coût des amendes - de 75 à 20 000 euros - ainsi que le chiffre des 120 fraudeurs pris en infraction depuis l'entrée en service du système. Ce dernier sera observé de près par les associations d'automobilistes, qui redoutent désormais que le péage puisse, un jour, s'appliquer aux véhicules individuels. Le ministre des transports, Manfred Stolpe, a résolument écarté cette possibilité.
