Concert Aline de Lima, une chanteuse est née Le 14 juin, à Paris, sur la scène du New Morning, Aline de Lima sera aussi accompagnée d'un saxophone, d'une contrebasse et d'un vibraphone. Mais le 5 mai, dans ce même petit temple du jazz et des musiques du monde, en première partie de la chanteuse péruvienne Susana Baca, la jeune Brésilienne se contentait d'une guitare et de percussions, sans que ses chansons en prennent ombrage. Le geste est encore timide, mais la voix papillonne avec agilité sur les rythmes souples et mélodies accroche-coeur tirés d'un premier album, Arrebol, distillant une envoûtante mélancolie et quelques lumineux sourires. Laissant à d'autres compatriotes (Cibelle) les gadgets électro, cette brune aux rayonnantes fossettes a choisi l'intemporalité de l'écrin acoustique pour ses compositions. BELLES PROMESSES Pour tailler les belles promesses de cette "aube" (arrebol en portugais), sa maison de disques, Naïve, lui a offert les doigts de fée de Vinicius Canturia, guitariste et producteur visionnaire de la chanson brésilienne, membre d'une fratrie new-yorkaise de musiciens (Arto Lindsay, Marc Ribot) aimant nourrir les traditions d'idées nouvelles. Devant la pureté des morceaux de la débutante, cet aventurier du son a misé sur l'élégance du classicisme. Il y a quelques mois, la chanteuse se retrouvait dans un studio d'enregistrement de la "Grosse Pomme", accompagnée de Cantuaria et sa bande de virtuoses. "J'avais trois jours pour terminer toutes mes voix", frissonne- t-elle encore aujourd'hui dans sa loge du New Morning. "Le premier soir, je n'en ai pas dormi. Jouer avec des pointures comme Paulo Braga, qui fut le batteur d'une de mes idoles, Elis Regina, c'était très intimidant. Heureusement, leur décontraction m'a beaucoup aidée." Il y a six ans à peine, Aline de Lima n'imaginait pas que la chanson serait sa voie. Originaire du Maranhao, Etat du nord, parmi les plus pauvres du Brésil, cette fille d'une institutrice et d'un employé de banque a été bercée par la MPB (musique populaire brésilienne) et un riche folklore régional, très marqué par l'identité africaine. "Mais au Maranhao, explique-t-elle, on fait souvent des complexes, on n'ose pas affirmer sa culture et réaliser ses rêves." A 19 ans, elle choisit l'exil en Suède pour rêver de design. En 1999, elle séjourne à Paris sans songer y rester. Une rencontre avec un musicien en décidera autrement. Depuis quelques mois, la jeune fille écrivait de petits poèmes inspirés par ses amours ou son vague à l'âme d'exilée. Encouragée par son ami musicien, elle va y poser une voix qui se révélera pleine de ressources. Parallèlement à ses premières armes, la néo-Parisienne se plongera avidement dans l'histoire musicale de son pays, dévorant les disques et presque autant de biographies ou d'essais sur les héros de la samba, de la bossa ou de la MPB. "Découvrir l'identité de ces artistes m'a aussi permis de me découvrir moi-même", dit-elle. Espère-t-elle un jour la reconnaissance de son pays natal ? "J'aimerais surtout que ma musique soit un pont entre ma vie en Europe et ma famille."