Procès Affaire Tapie-Adidas : un épisode judiciaire à un milliard d'euros Un nouvel épisode de la saga judiciaire de Bernard Tapie s'ouvre mercredi 8 juin. La cour d'appel de Paris est appelée à trancher un litige à un milliard d'euros entre l'Etat français et l'homme d'affaires sur les conditions de cession du groupe Adidas. Ce procès intervient après l'échec en avril d'une médiation entre Bernard Tapie et l'Etat sur les conditions de cession au début des années 1990 par le Crédit lyonnais de l'équipementier sportif, dont l'homme d'affaires et ex-ministre sous le président François Mitterrand fut brièvement propriétaire. L'affaire elle-même oppose depuis 1996 le Consortium de réalisation (CDR), l'organisme chargé d'assumer la gestion passée du Crédit Lyonnais en lieu et place de la banque, et les actionnaires minoritaires de Bernard Tapie Finance (BTF), c'est-à-dire essentiellement Bernard Tapie lui-même. Celui-ci estime avoir été illégalement privé d'une plus-value importante réalisée lors de la cession du groupe Adidas à l'industriel français Robert-Louis Dreyfus en 1993-1994. Il demande réparation par le versement de 990 millions d'euros, selon son avocat, Me Maurice Lantourne. Bernard Tapie, dont la situation financière et judiciaire était alors particulièrement délicate, estime avoir été "ruiné, mais surtout déshonoré par le Crédit lyonnais", sa banque de l'époque. Pour ce dernier, le Lyonnais a, dans la transaction contestée, pratiqué "un mélange des genres invraisemblable" puisque la banque, à l'époque publique, en tant que "banquier du vendeur BTF, (...) avait un mandat de vente d'Adidas et elle était également banquier de l'acquéreur", en l'occurrence Robert-Louis Dreyfus. LE "RISQUE FINANCIER" D'UN PROCÈS La demande de réparation a été jugée excessive par le CDR qui lui proposait d'abandonner "les 100 millions d'euros de créances dues par Bernard Tapie, mais pas sa dette fiscale de 40 millions d'euros", selon une source proche du dossier. Dès 1994, devant la commission d'enquête parlementaire mise en place après la quasi-faillite de la banque, l'ancien PDG du Crédit lyonnais, Jean Peyrelevade, avait rejeté les arguments de Tapie, en expliquant que ce dernier avait acquis Adidas grâce à un prêt accordé par la banque, garanti par la mise en hypothèque des titres de sa société. Avant le procès qui doit durer toute la journée de mercredi, les deux parties ont essayé de se rapprocher pendant environ six mois. Le 12 novembre 2004, la cour d'appel de Paris donnait son accord à une médiation pour mettre fin au contentieux. Selon le journal Le Monde, Nicolas Sarkozy, alors ministre des finances, avait accepté l'ouverture de cette médiation au vu de deux rapports confidentiels mettant en avant le "risque financier" d'un procès et le "manque de transparence" des opérations de la banque. Un haut magistrat, Jean-François Burgelin, était nommé pour arbitrer une négociation dont le délai prévu était initialement de trois mois. En février, la cour accordait un nouveau délai. Mais, à son terme, le 12 avril, aucun accord n'avait pu être trouvé. Il appartient donc désormais aux magistrats de la 3e chambre de la cour d'appel de Paris de solder le litige entre le CDR et BTF. Dans une interview accordée le lendemain au journal populaire Le Parisien, Bernard Tapie - devenu comédien - rompait plusieurs mois de silence pour afficher sa détermination à se battre sur le terrain judiciaire en dénonçant "l'arnaque Adidas" dont il se dit victime. "Je ne veux pas que 100 % des Français me prennent pour un escroc ou un mauvais gestionnaire ! Je veux démontrer au contraire que je n'aurais jamais du être mis en liquidation. J'ai été victime d'une opération politique qui avait pour objectif de m'éliminer", a-t-il affirmé.