Annonce Affaire Alègre : Happé dans la tourmente, le président du CSA, ancien maire de Toulouse, répond dans un livre à ceux qui l'ont sali Dominique Baudis dénonce les «calomniateurs» Un accablant tableau de la société française. Lorsque l'on referme le journal intime de Dominique Baudis – entamé le 12 mai 2003 quand un proche collaborateur lui révèle : «On fait circuler votre nom dans l'affaire Alègre», et achevé le 2 novembre 2004 sur la notification du juge l'avisant de son intention de clore le dossier –, c'est un sentiment d'écoeurement que l'on éprouve, comme l'auteur. Malgré le soin que Dominique Baudis prend d'éviter tout «mélo», c'est dans une descente aux enfers que nous entraîne son livre. (Photo Bruno Hudrecht/Photo12.com.) On attendait la réponse aux questions que se pose, de manière obsédante, l'ancien maire de Toulouse : «D'où ça vient ? Pourquoi ? Comment découvrir la vérité sur cette machination ?» Au fil des jours et des confrontations – notamment avec l'accusatrice principale, Christèle Bourre, la fameuse «Patricia» – on peine, avec Dominique Baudis, à découvrir la trame du complot auquel il avait d'abord cru – un complot destiné à abattre le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, mais aussi l'homme politique de 57 ans resté si populaire à Toulouse. Malgré le soin qu'il prend d'éviter tout «mélo», c'est dans une descente aux enfers qu'il nous entraîne. Personne n'est épargné : ni la justice, ni la gendarmerie, si bornées, ni la classe politique, si peureuse, ni surtout la presse, si légère quand elle ne se montre pas d'une bassesse abjecte. La couverture du livre est illustrée d'une photo prise le 18 mai 2003 sur le plateau de TF 1 alors que Baudis jure, le front en sueur : «La calomnie, je vais l'affronter face-à-face, les yeux dans les yeux et je vais la prendre à la gorge.» Mais voilà : la calomnie n'a pas de visage. Au début, Baudis croit pourtant pouvoir lui en donner un : celui de l'industrie pornographique. N'a-t-il pas accusé les producteurs de films X pour la télévision de mettre en danger, chaque année en France, un million de mineurs ? Rapidement, pourtant, il abandonne cette piste. Pour concentrer son attention sur une famille depuis toujours en guerre contre les Baudis père et fils. Dès 1997, l'héritier régional du Parti radical socialiste, Jean-Michel Baylet, ulcéré par une affaire d'abus de biens sociaux, ne donnait-il pas «pour consigne aux plus fins limiers de son journal de dénicher des affaires touchant la municipalité de Toulouse» ? Or ce journal, La Dépêche, sera le premier à accorder autant de crédit aux mensonges de la prostituée Patricia. Les noms de La Dépêche et de Baylet reviennent donc pas moins d'une trentaine de fois dans le livre. Mais l'on devine que si la famille ennemie a joué un rôle d'amplificateur de la calomnie, elle n'en est peut-être pas à l'origine. De même Baudis ne peut-il rien reprocher d'autre à son successeur au Capitole et, croyait-il, à son ami Philippe Douste-Blazy, que sa faiblesse. Informé, Douste aurait dû lui parler. Il n'aurait pas dû, surtout, laisser l'un de ses collaborateurs répandre dans les dîners en ville des fables nauséabondes. Mais que dire du substitut Heinish qui, à propos de l'emploi du temps de Baudis le 20 novembre 1990, ose écrire : «Il apparaît qu'il était présent dans une commission parlementaire entre 16 et 19 heures, alors qu'il déclare avoir reçu à 18 heures, dans son bureau de l'Assemblée nationale une délégation libanaise» ? Pauvre justice ! Pauvre presse ! Et pauvre France où, comme à Outreau, des innocents sont persécutés, tandis que des criminels comme Émile Louis sévissent durant des années ! La seule conclusion que puisse, hélas, en tirer l'auteur, c'est que ce qui lui est arrivé «peut frapper n'importe qui». En Belgique, au Portugal ou en Grande-Bretagne comme en France. Mais le moyen, alors, de se défendre contre la calomnie ? Un procès ? «Il faut deux ans au minimum et beaucoup de frais de justice, écrit Dominique Baudis, revenu de tout sauf de l'amour de sa famille et de l'attachement de ses chers Toulousains. En attendant, il faut subir l'insupportable.»Face à la calomnie, Dominique Baudis, Fixot Editions, 318 pages, 19,90 €
