Annonce A Pretoria, tous les acteurs de la crise ont décidé de donner un coup d'accélérateur pour mettre en oeuvre les accords signés en avril L'Afrique du Sud relance le processus de paix ivoirien De l'avis général, une élection présidentielle transparente fin octobre est la seule solution pour sortir la Côte d'Ivoire de la crise qu'elle traverse depuis près de trois ans. Aussi, les quatre principaux acteurs ivoiriens ont décidé de donner un coup d'accélérateur pour mettre en oeuvre les accords de Pretoria signés en avril et restés jusqu'ici lettre morte. Cette seconde rencontre en Afrique du Sud, organisée par le président Thabo Mbeki, s'est achevée avec son lot de bonnes résolutions, comme le démantèlement immédiat des milices, une réunion prévue le 7 juillet pour fixer le calendrier du désarmement des militaires et le vote des lois en suspens d'ici au 15 juillet. Mais en y regardant de plus près, il saute aux yeux que ces échéances ne pourront être respectées. Sur un plan purement politique, sept lois doivent être adoptées par l'Assemblée nationale d'ici deux semaines. L'une concerne la composition de la Commission Electorale Indépendante (CEI), qui doit assurer la crédibilité des prochains scrutins. Considérant qu'ils sont sous-représentés dans cette commission, les rebelles s'en sont retirés. Une fois repassée au Parlement, la loi devrait aussitôt reprendre du service. Elle devra alors élaborer des listes électorales, en s'appuyant sur la loi sur la nationalité, qui doit également être révisée. Le concept xénophobe d'Ivoirité, qui vise à exclure le quart de la population d'origine étrangère, a posé de nombreux problèmes d'identification pour les Ivoiriens du Nord. Il semble utopique de croire que ce long processus pourra être mis en oeuvre dans les trois mois et demi qui sépareront le passage à l'Assemblée des élections. Sur le plan technique, le désarmement des 42 000 rebelles et des 5 500 militaires prend un mois de retard par rapport à la date initiale du 27 juin. Et quand bien même les rebelles accepteraient de désarmer, ce que ne croient pas les diplomates français, un problème de taille se posera. Les sites de cantonnement, qui doivent accueillir les militaires, sont prêts au Sud, mais les travaux ne sont pas fins au Nord. Par ailleurs, les militaires seront-ils assez nombreux pour désarmer plus de mille soldats par jour ? Vient pour finir le problème des milices, dont le désarmement immédiat doit être assuré par le gouvernement et s'achever le 20 août. Le premier ministre considère qu'il y a 20 000 miliciens à Abidjan et 4 000 dans l'Ouest. Pourtant, le Front de Libération du Grand Ouest, le principal mouvement dans cette région, revendique à lui seul 7 000 hommes. Se pose donc la question de la définition des miliciens, sur laquelle Gbagbo entretient volontairement le flou. Lors d'une tournée dans l'Ouest, il a déclaré : «Il n'y a pas de milices ici», uniquement des hommes qui refusent de mourir et s'organisent pour se défendre. Alors qu'Alphonse Djédjé Maddy, le porte-parole du G7, rassemblement de l'opposition, a évoqué cette semaine la possibilité d'une période de transition avant l'organisation de l'élection, Gbagbo semble être le plus farouche défenseur du respect des dates constitutionnelles. Il a d'ailleurs débuté sa précampagne. Les ralliements d'anciens membres du PDCI, ancien parti unique, et du RDR, parti d'Alassane Ouattara, se multiplient et sont surmédiatisés. Il faut dire que Gbagbo n'a face à lui qu'une opposition silencieuse et peu active. Henri Konan Bédié, leader du PDCI, et Alassane Ouattara, du RDR, sont exilés en France depuis plusieurs années. Les mesures de protection décidées à Pretoria pour qu'ils reviennent dans le pays feront peut-être évoluer la situation. Bédié a annoncé qu'il pourrait rentrer en août. Mais à peine auront-ils le pied posé sur le sol ivoirien qu'ils deviendront des cibles à abattre. En particulier Ouattara, qui cristallise la haine puisqu'il est considéré par de nombreux Ivoiriens comme l'instigateur de la rébellion. Pour augmenter les chances de résultat, la menace de sanctions a été brandie à Pretoria. Si les délais ne sont pas respectés, la médiation «entreprendra de recommander l'imposition de sanctions des Nations unies». Mais elles ne pourront être appliquées que lorsqu'il sera avéré que l'un des camps n'a pas respecté ses engagements. Et vu l'imminence des échéances, ces sanctions tomberont trop tard pour peser sur l'organisation des élections.